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Afrique et Moyen-Orient
28/07/2008 - 18:16

Une prison désaffectée au nord de Bagdad, symbole des ratés de la reconstruction américaine en Irak


Dans les plaines au nord de Bagdad, se dresse une prison vide. Le centre de détention de Khan Bani Saad, dans la province de Diyala, qui aura coûté 40 millions de dollars (25,5 millions d'euros) et reste à ce jour sans affectation, apparaît comme un symbole des innombrables gaspillages et ratés recensés dans les efforts de reconstruction de Washington depuis l'invasion de l'Irak en 2003.



"Pour l'instant, c'est un peu un monument dans le désert, car il ne sera pas utilisé comme prison", déplore Stuart Bowen, l'inspecteur général spécial pour la reconstruction américaine. Ses services publiaient lundi un rapport réalisant l'inventaire des problèmes liés à la construction de cette prison, confiée au groupe californien de BTP Parsons.

"C'est 40 millions de dollars investis dans un projet pour peu de retours", a ajouté Stuart Bowen dans un entretien accordé à l'Associated Press à Washington. "Quelques bâtiments sont utiles. Autrement, c'est un échec".

La prison de Khan Bani Saad est loin de représenter le plus gros raté des investissements américains en Irak ces dernières années. Selon M. Bowen, environ 20% des 21 milliards de dollars (13,4 milliards d'euros) du Fond d'urgence et de reconstruction pour l'Irak -soit quatre milliards de dollars (2,5 milliards d'euros)- ont tout simplement été perdus.

Mais cet édifice quasi-inutilisable représente "un microcosme" qui concentre "les lacunes du programme de reconstruction", selon les propres mots de l'auditeur américain. Pour le président du conseil municipal de Khan Bani Saad, Sayyed Rasoul al-Husseini, c'est "un gros monstre qui a avalé de l'argent et des espoirs", dont ceux de créer plus de 1.200 nouveaux emplois dans le secteur.

Selon le rapport de M. Bowen et le témoignage de M. Al-Husseini, qui se rend parfois sur les lieux à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Bagdad, de nombreux murs de béton sont insuffisamment renforcés et commencent à se fissurer, et les colonnes sont trop faibles. Au point que certaines parties de l'édifice, qui abritent aujourd'hui des nids d'oiseaux et autres petits animaux, sont tout juste bonnes pour la démolition.

"Mais certaines unités de cellules sont bonnes", a cependant souligné M. Al-Husseini. "Donc peut-être elles pourraient devenir une usine. Je ne sais pas. C'est déprimant".

La firme Parsons s'est vue confier le contrat de construction d'une prison pour 1.800 détenus en mars 2004 par l'Autorité provisoire de la coalition, mise en place par Washington après la chute du régime de Saddam Hussein l'année précédente. La construction devait être achevée en novembre 2005, mais le début des travaux a été retardé de six mois en raison de la montée en puissance de l'insurrection.
 
Les autorités américaines ont décidé de dessaisir Parsons du projet en 2006, citant des retards et des surcoûts, et ont ré-attribué par la suite le dossier trois fois à d'autres entreprises, sans plus de succès.

L'échec de Khan Bani Saad est d'autant plus sérieux que la province de Diyala avait un besoin urgent de capacité carcérale. Dans une autre prison prévue pour 250 détenus, 600 personnes sont actuellement entassées, selon les informations de l'équipe de M. Bowen. Une surpopulation qui aurait provoqué plusieurs décès, selon le rapport.

Parsons, qui a quitté l'Irak il y a deux ans, est "le pire sous-traitant que nous ayons recensé", a noté M. Bowen. Sur 53 projets évalués à 900 millions de dollars (573 millions d'euros), seuls 18 ont été terminés. L'entreprise a été payée 333 millions de dollars (212 millions d'euros), dont près de la moitié pour des projets qui n'ont pas abouti. Selon le rapport rédigé par M. Bowen, si certaines difficultés sont "compréhensibles étant donnés la nature complexe et l'environnement sécuritaire instable en Irak, des millions de dollars" ont sans doute été gaspillés.

Selon le rapport, Parsons soutient que le gouvernement américain a minimisé les problèmes de sécurité sur le terrain. En août 2005, le gérant d'un sous-traitant de l'entreprise a été abattu dans son bureau. Si Diyala reste une des régions les plus dangereuses du pays, le Corps du génie de l'armée américaine, qui surveillait les travaux à Khan Bani Saad, rétorque que Parsons n'ignorait rien des conditions qui régnaient en Irak à l'époque, et n'a que rarement rapporté des menaces contre ses personnels aux autorités.

Source: yahoo news

Arame Diène



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