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France
26/05/2008 - 11:57

Le procès Fourniret a mis la justice devant ses défaillances


L'avocat général Francis Nachbar a conclu jeudi dernier deux mois d'audience remplis de récits d'épouvante et des larmes des victimes par un réquisitoire très violent, fustigeant des "fêlés", des "monstres", un "Diable à double visage".


Le procès des époux Fourniret va s'achever mercredi sur une possible réclusion à perpétuité pour les deux accusés de sept meurtres de jeunes filles entre 1987 et 2001, mais aussi sur de lourdes interrogations quant au fonctionnement du système judiciaire français.

Le magistrat a fait un aveu. Oui, a-t-il dit au nom du système, "nous n'étions pas armés pour affronter l'inhumanité d'un couple qui fusionne en un seul être au service du crime". La justice n'est aujourd'hui toujours pas prête, avoue-t-il.

Pour les parties civiles, le système est inadapté, voire défaillant. Leurs avocats ont souligné à l'audience qu'aucune instruction ne fut jamais ouverte sur la disparition d'Isabelle Laville, première victime des Fourniret en 1987, près d'Auxerre, malgré un rapport de gendarmerie concluant à l'enlèvement, classé à deux reprises sans suite par le parquet.

Fourniret venait de sortir de prison et, résidant à quelques kilomètres des lieux de la disparition, il était théoriquement dans une période de probation. "Une chance a été perdue d'identifier les Fourniret", a estimé Me Alain Behr, avocat de la famille Laville. Le père de l'adolescente estime qu'Isabelle a été traitée comme "un chien écrasé sur la route".

L'examen du deuxième assassinat imputé aux Fourniret, celui de Fabienne Leroy en 1988 dans la Marne, a mis en lumière l'archaïsme des méthodes d'enquête criminelles françaises.

Quelques éléments matériels imprécis et des aveux en garde à vue qui apparaissent aujourd'hui comme extorqués ont conduit en prison pour trois mois un innocent, collègue de travail de Fabienne Leroy devenu "victime collatérale de Michel Fourniret", a dit le président Gilles Latapie.

CASIER JUDICIAIRE INOPÉRANT

Le jury a aussi découvert à l'audience que Michel Fourniret et son épouse avaient comparu en correctionnelle à Nantes en novembre 1990, pour des dégradations chez l'ex-époux de Monique Olivier, sans que le tribunal ait connaissance de la totalité du casier judiciaire de l'accusé.

Le tueur, qui avait pourtant été condamné pour des atteintes sexuelles depuis les années 60 et venait de sortir de prison en 1987 avec un sursis théoriquement révocable, a été laissé libre par le tribunal, qui n'a prononcé qu'un nouveau sursis. Il a tué le lendemain de son procès la jeune Natacha Danais.

Absente de son casier, sa condamnation criminelle de 1987 n'a pas davantage été portée à la connaissance des magistrats de Verdun qui, sans autres vérifications, l'ont condamné à quelques mois de prison en 1991 pour des agressions de femme.

L'avocat général a expliqué que les casiers judiciaires s'effaçaient au fil du temps du fait de divers processus légaux, ce qui les rend inopérants, soulignent les parties civiles.

S'ajoutent à ce bilan d'autres enquêtes tardives ou très partielles dans le dossier, et l'absence de traitement de la plainte déposée par Jean-Pierre Hellegouarch, truand dont la femme fut assassinée par Fourniret.

Les parties civiles gardent l'image d'un système engorgé, désordonné, aux méthodes désuètes et qui n'a pas intégré la probabilité de crimes en série dans son fonctionnement.

"La plupart des tueurs en série sont arrêtés par hasard et pas parce qu'on a mis tous les moyens", a dit dans sa plaidoirie en partie civile Me Didier Seban. Il juge nécessaire la création de services de police et de justice spécialisés.

Les avocats soulignent que les nouveaux dispositifs mis en place ces dernières années, fichier des empreintes génétiques (FNAEG), fichier des délinquants sexuels (FIJAIS), logiciel d'analyse criminelle SALVAC, ne sont pas encore opérationnels.

Le bracelet électronique mobile n'est pas non plus au point techniquement. Les divers contrôles théoriques imposés aux délinquants sexuels se limitent souvent à des convocations épisodiques, faute de moyens pour les magistrats, qui peuvent cumuler plus de cent dossiers de détenus.

Source: news.yahoo.com


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