Après dix ans de procédure, trois semaines de procès et plus de six heures de délibéré, la cour d'Albi n'a pas suivi les réquisitions de l'accusation, qui avait réclamé vendredi une peine de 15 à 20 ans de réclusion criminelle.
Jacques Viguier avait déjà été acquitté en première instance en février 2009 aux assises de Haute-Garonne. Le verdict d'appel met un terme probable à l'affaire judiciaire, sans résoudre le mystère de la disparition de Suzanne Viguier.
L'avocat général Marc Gaubert s'était montré hésitant en n'excluant pas une requalification des faits d'homicide en "coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort", option écartée par la cour.
Le parquet général n'a plus comme ressource qu'un pourvoi en cassation sur un hypothétique problème de forme, ce qui est peu probable.
Sous de brefs applaudissements de ses proches, interrompus par le président de la cour, Jacques Viguier a étreint ses avocats et embrassé ses enfants à l'annonce du verdict, avant de quitter la cour en évitant les journalistes.
Dans la matinée, il avait pris la parole une dernière fois à la fin des débats pour clamer une nouvelle fois son innocence.
"Je vous supplie de me rendre ma dignité d'homme, pour moi, pour mes enfants, pour Suzy. (...) Je viens de vivre dix ans d'horreur, de calvaire. Ne faites pas durer encore ce calvaire", avait dit l'accusé, détenu durant neuf mois pendant l'enquête.
Me Eric Dupond-Moretti, avocat de Jacques Viguier, qui avait plaidé en dénonçant un "concours Lépine des hypothèses", a salué le verdict comme une victoire des principes fondamentaux concernant le bénéfice du doute à l'accusé.
NI CADAVRE NI AVEUX
"Cette affaire, c'est dix ans de procédure, dix ans de rumeurs, dix ans d'acharnement, et au bout de tout cela, l'innocence pour un homme cassé, brisé à vie (...) Jacques Viguier a été victime d'erreurs policières commises par des enquêteurs qui n'ont pas fait leur travail", a-t-il dit.
Il n'y a ni cadavre, ni aveux, ni témoin dans ce dossier où l'existence d'un crime n'est pas démontrée. L'accusation n'est pas en mesure de proposer un scénario des faits.
Les charges sur Jacques Viguier étaient notamment basées sur le fait qu'il s'est débarrassé d'un matelas après la disparition de sa femme et a négligé de dire à la police qu'il avait retrouvé le sac à main de la disparue avec ses clefs.
Sa femme, qui entretenait une liaison, avait décidé de divorcer de son mari, qui l'avait souvent trompée et elle a disparu après que son amant l'a ramenée chez elle.
Pendant le procès, Jacques Viguier a été soutenu par les trois enfants qu'il a eus de Suzanne, qui ont dit à la cour qu'ils jugeaient impossible que leur père ait tué leur mère.
La mère de Suzanne Viguier soutenait aussi l'accusé, mais la soeur et la demi-soeur de la disparue ont au contraire dit à la cour qu'elles étaient certaines de sa culpabilité, comme l'ex-amant de Suzanne Viguier, Olivier Durandet.
Ce dernier a été brièvement placé en garde à vue durant le procès pour avoir suborné un témoin afin de cacher qu'il avait "visité" le domicile des Viguier après la disparition.
Tout en disant regretter le verdict "à titre personnel", Me Francis Szpiner, avocat des soeurs de la disparue, a salué le respect des principes. "Le doute doit profiter à l'accusé, c'est ce qui vient de se passer à l'issue d'un procès exemplaire, et l'on ne peut que s'en féliciter", a-t-il dit.
L'avocat général a déclaré qu'il ne regrettait pas l'appel du premier verdict de 2009 déposé par le parquet général, sans éléments nouveaux. "Suzanne Viguier méritait que la justice aille jusqu'au bout de son possible", a-t-il dit.
Source: Reuters via Yahoo
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