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Afrique et Moyen-Orient
29/10/2009 - 14:21

Refus d'enquête en France sur des chefs d'Etats africains

La décision d'un juge d'instruction français ouvrant la voie à une enquête sur les logements de luxe et les avoirs bancaires détenus en France par trois présidents africains a été annulée en appel à Paris.



Ce dossier visait les biens détenus par la famille d'Ali Bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzavile) et Teodoro Obiang (Guinée équatoriale).

Suivant l'avis du parquet, qui avait fait appel de la décision, la chambre de l'instruction a déclaré irrecevable la plainte de l'ONG anticorruption Transparency International, estimant qu'elle n'avait pas de qualité juridique à agir.

En mai dernier, la juge d'instruction Françoise Desset avait créé un choc en Afrique et en France en rendant une ordonnance où elle déclarait la plainte recevable, ouvrant la voie à une information judiciaire pour "recel de détournement de fonds publics, blanchiment, abus de biens sociaux, abus de confiance".

Transparency International va se pourvoir en cassation.

"Le combat mené aura de toute évidence permis de briser un tabou sur la question des avoirs illicites en provenance des pays du Sud qui trouvent refuge dans ceux du Nord", dit l'ONG.

Une enquête de police de 2007 avait recensé en France 39 propriétés et 70 comptes bancaires détenus par Omar Bongo et ses proches, 24 propriétés et 112 comptes bancaires pour la famille Sassou Nguesso, et des limousines de luxe achetées par la famille Obiang. Les plaignants estiment que ces biens n'ont pu être acquis qu'avec de l'argent détourné.

Me William Bourdon, avocat de Transparency, considère que la décision de la chambre d'instruction est politique.

"Aujourd'hui, c'est champagne pour l'association de malfaiteurs franco-africaine, qui organise et tire profit du pillage des deniers publics africains", a-t-il dit à la presse.

L'affaire a créé des remous dans les trois pays, pivots de l'influence diplomatique française en Afrique, et où la première société française Total a d'importants intérêts.

Les plaignants ont accusé le parquet, qui a suscité l'examen du dossier en appel, d'agir comme "bras armé de la raison d'Etat".

Bien qu'ils ne soient pas partie à la procédure, deux des trois chefs d'Etats indirectement visés avaient dépêché des avocats à la cour d'appel jeudi.

Me Olivier Pardo, avocat du président de la Guinée équatoriale, a lancé une contre-attaque en mettant en cause les plaignants, qu'il juge manipulés.

"L'instrumentalisation de la justice n'a pas fonctionné. Maintenant, il faut se demander qui se cache derrière ceux qui se disent transparents ? Je ne suis pas certain qu'on soit dans une démarche purement humanitaire", a-t-il dit.

Me Patrick Maisonneuve, avocat d'Ali Bongo, qui a succédé à son père mort en juin après 41 ans au pouvoir, a précisé que son client ne possédait pas de biens à son nom.

"Il n'a pas de crainte particulière de la justice et de la transparence", a-t-il dit, jugeant l'arrêt conforme au droit.

Si l'enquête avait été lancée, les magistrats se seraient heurtés à l'immunité coutumière accordée aux chefs d'Etat en exercice. Mais leurs proches n'en bénéficient pas et pouvaient donc en théorie être arrêtés, sauf immunité diplomatique.

Le procès Elf à Paris en 2003 avait démontré que les revenus tirés du pétrole profitaient personnellement aux chefs des Etats en question. Ces derniers nient toute malversation.

Pour juger la plainte de Transparency recevable, la juge Desset avait procédé par analogie avec les associations antiracistes ou antitabac, habilitées par la loi et la jurisprudence à agir en justice sur des faits en lien avec l'objet de leurs activités.

La cour d'appel de Paris rejette ce raisonnement en considérant que Transparency, qui n'est pas officiellement reconnue d'utilité publique, n'a pas de préjudice personnel et direct du fait des faits de corruption allégués.


Source: Reuters via Yahoo News

Awa Diakhate










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