Le CCNE estime que l'inscription dans la loi d'une identification biologique réservée aux seuls étrangers fait de la filiation génétique un facteur déterminant "en contradiction avec l'esprit de la loi" française.
Il redoute également que le recours à de tels dispositifs ne conduise à une "banalisation" de l'identification génétique avec les risques afférents de "discrimination" et déplore la "présomption de fraude" qu'implique le recours aux test.
Cette autorité indépendante, ayant pour mission de donner son avis sur les problèmes éthiques et composée de 40 membres, est présidée par Didier Sicard, professeur de médecine.
Elle comprend notamment des médecins, des philosophes, des représentants des communautés religieuses, des juristes, des chercheurs et des élus.
Saisi en urgence mercredi par une sénatrice, le CCNE regrette tout d'abord que des questions aussi importantes concernant l'accueil des étrangers et le droit de la filiation fassent l'objet de "procédures en urgence."
Il prend acte du fait que des amendements successifs ont permis lors des débats au Sénat de mieux prendre en compte la notion de famille "telle que définie dans le droit français."
Mais le comité n'en demeure pas moins extrêmement réservé sur cette disposition figurant dans la loi sur la maîtrise de l'immigration en cours d'examen au palais du Luxembourg.
Les sénateurs ont adopté dans la nuit de mercredi à jeudi une version modifiée de l'amendement Mariani voté à l'Assemblée nationale le 19 septembre, afin d'y introduire des garde-fous.
Le CCNE craint néanmoins que "l'esprit de ce texte ne mette en cause la représentation par la société d'un certain nombre de principes fondamentaux", notamment sur le secret de filiation.
"L'erreur est de laisser penser qu'en retrouvant le gêne, la filiation serait atteinte", écrit-il notamment.
Le CCNE redoute en outre les modalités concrètes d'application "dans des réalités culturelles très différentes des nôtres".
"Nos concitoyens comprendraient peut-être mieux l'exacte réalité de tels enjeux s'ils étaient confrontés à des exigences analogues lors de leur propre demande de visa", souligne-t-il.
Pour le comité, le fait de faire primer une filiation génétique vis à vis du père ou de la mère comme étant un facteur déterminant est en contradiction avec l'esprit de la loi.
"De nombreuses familles françaises témoignent de la relativité de ce critère: famille recomposées après divorce, enfant adopté, enfant né d'un accouchement dans le secret", précise-t-il.
Outre la question de la "validité" des marqueurs biologiques, le CCNE se déclare préoccupé par "la charge anormale de preuves qui pèsent sur le demandeur."
D'une manière générale, le comité attire l'attention sur la dimension profondément symbolique dans la société "de toute mesure qui demande à la vérité biologique d'être l'ultime arbitre" dans des questions touchant à l'identité sociale et culturelle.
"Elle conduirait furtivement à généraliser de telles identifications génétiques qui pourraient à terme se révéler attentatoires aux libertés individuelles", dit-il.
Le Sénat doit se prononcer dans la nuit de jeudi à vendredi sur le projet de loi sur la "maîtrise de l'immigration" qui contient un article prévoyant à titre expérimental le recours à des tests ADN pour les candidats au regroupement familial.
Source: Yahoo News
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