Il n'y a rien à célébrer ici.
La classe dirigeante allemande prévoyait de célébrer le jour du trentième anniversaire de «l'adhésion» de la République Démocratique d'Allemagne à la RFA. Mais les festivités ont été sapées non seulement à cause de la pandémie, mais aussi parce que des voix de protestations se font plus entendre dans tout le pays et montent contre la politique de désindustrialisation de l'ex-RDA, la militarisation de l'Allemagne et la rhétorique agressive contre le premier État socialiste sur le sol allemand.
Lors d'une conférence qui s'est déroulée le 5 octobre à Berlin, l'Union des associations et organisations publiques d'Allemagne de l'Est (OKW) a présenté une déclaration «Pour un avenir meilleur», qui a été soutenue par plus de 100 représentant.e.s des associations d'Allemagne de l'Est et de l'Ouest, dont le dernier Secrétaire général du Comité central du SED, Egon Krenz, des femmes et des hommes politiques comme Helene Brombacher (dirigeante plate-forme communiste au sein de Die Linke) et Alexander Noah (membre du Bundestag pour Die Linke), Patrick Koebele (président du Parti communiste allemand - DKP) et Torsten Schewitz (président du Parti Communiste d'Allemagne - KPD interdit).
Les auteur.e.s de la lettre déclarent: "Il y a 30 ans, la RDA a «rejoint» la RFA. De nombreux citoyen.ne.s de la RDA avaient l'illusion de pouvoir vivre une vie pacifique, libre, égale et prospère dans une Allemagne unie. Pour la plupart des citoyen.ne.s, cette illusion ne s'est pas matérialisée. Ils sont coincés dans un système social dominé par l'argent et la cupidité. Il est particulièrement choquant que nous vivions aujourd'hui dans un État dans lequel les autorités au pouvoir calomnient la Russie et font chanter ses dirigeant.e.s à la fois politiquement et économiquement.
La plupart des citoyen.ne.s de la RDA, qui ont consacré leur vie à bâtir un avenir meilleur, ne veulent pas d'un tel État. Ils veulent que la paix, la liberté et que la dignité humaine ne soient pas des phrases creuses. Ils n'oublieront jamais que l'Union soviétique a libéré l'Allemagne du fascisme et a sacrifié des millions de vies humaines pour cela. L'amitié et la paix avec la Russie sont une question de cœur pour eux. Ils ne veulent pas de liens autres qu'amicaux avec la République populaire de Chine. Au nom des Allemands de l'Est, nous exigeons la non-ingérence dans les affaires des autres États et la levée de toutes les sanctions.
La pandémie de COVID-19 a révélé l'incapacité du système capitaliste à résoudre les problèmes fondamentaux de l'humanité. Nous reconnaissons la nécessité d'un changement fondamental pour nos vies. Nous nous efforçons de :
- Abandonner cette société de consommation qui avili les masses à travers les médias;
- Mettre fin à la domination du capital financier et des spéculateurs;
- Mettre un terme à l'accumulation de richesses gigantesques par quelques-uns au détriment de l'écrasante majorité de la population mondiale;
- Abandonner les productions qui se font aux dépens des matières premières et des sources d'énergie des pays les plus pauvres et des conditions de travail et de vie inhumaines de leurs citoyens;
- Abandonner la fragmentation de la production dans le monde et, par conséquent, arrêter le transport insensé de marchandises par voie terrestre, maritime et aérienne;
- Mettre fin à la privatisation des établissements médicaux, des logements, des services sociaux, des transports publics, des systèmes d'approvisionnement en énergie, des institutions éducatives, culturelles et sportives; les restituer à l'État, aux coopératives et aux municipalités afin de répondre aux besoins essentiels de la population;
- Et, surtout, mettre un terme aux aventures militaires, à la production et à l'exportation d'armes à travers le monde.
Nous notons avec inquiétude que la pandémie de COVID-19 est utilisée par la classe dirigeante non seulement pour détruire complètement le système social, mais aussi pour imposer de manière expansive un modèle de production néolibéral à l'échelle mondiale. Nous craignons que la lutte contre la pandémie ne soit un prétexte pour transférer le fardeau économique sur la population grâce à des mesures d'austérité et à un démantèlement supplémentaire des droits démocratiques fondamentaux.
Nous appelons tou.te.s les citoyen.ne.s à s'opposer publiquement à cette politique. Nous encourageons et soutenons, en particulier, la jeune génération, qui revendique activement un modèle social pacifique, socialement juste et respectueux de l'environnement. Nous appelons tous les partis, associations et organisations de gauche à mettre de côté les conflits idéologiques et à unir leurs forces pour atteindre ces objectifs vitaux."
Pour contrecarrer les célébrations de «l'unification» de l'Allemagne et perturber la fête des capitalistes, des organisations de jeunesses ont organisé du 2 au 4 octobre, avec le soutien du magazine de gauche «Konkret» à Potsdam, la conférence «Re: Surrender». C'est Potsdam, la capitale de la monarchie prussienne et du militarisme, sur le site de la conférence de Potsdam, que les autorités allemandes ont choisi le lieu pour la célébration de l'Anschluss de la RDA.
En raison de la situation épidémiologique, les événements ont été remplacés par une exposition décentralisée, un culte œcuménique et une cérémonie solennelle.
L'initiative de protestation "Re: Surrender" a préparé sur son site Internet une longue liste d'événements politiques des 30 dernières années survenus après l'adhésion de la RDA à la RFA et la destruction du socialisme: la restriction des droits des femmes, qui étaient garantis par la législation de la RDA, l'organisation de meurtres et de pogroms motivés par le racisme, la participation de l'Allemagne à l'attaque contre la Yougoslavie en 1999 jusqu'au démantèlement des garanties et prestations sociales en 2004.
"Une chose est claire pour nous: il n'y a rien à célébrer ici! Au contraire, la folie nationale masque les outrages qui ont lieu dans le pays", déclarent les participant.e.s à l'événement.
Andrey DULTSEV
La Pravda
