La mort d’un adolescent africain-américain de dix-huit ans, abattu dans la nuit de mercredi à jeudi par un officier de police blanc dans le sud de Saint-Louis, est venue accentuer encore le climat de tension extrême qui règne sur l’agglomération. L’affaire renvoie en effet immédiatement à la tragédie qui, plus au nord, à Ferguson, a coûté la vie, il y a tout juste deux mois, à un autre ado noir, Michael Brown, victime des tirs d’un autre officier de police blanc. L’information à peine connue, une foule de plusieurs centaines de personnes, dont beaucoup de jeunes, impliquées dans le Mouvement pour que justice soit faite à Michael Brown, a convergé vers le lieu de ce nouveau drame.

La colère était sur tous les visages. « Nous ne voulons pas d’une police raciste », ont entonné les manifestants. « Arrêtez de nous tuer », a lancé une jeune femme, venue de Ferguson avec plusieurs militants de la coalition Hands Up, Don’t Shoot (Mains en l’air, ne tirez pas), créée après la mort de Michael Brown, en allusion aux multiples témoignages attestant que le policier a tiré sur le jeune homme alors que ce dernier avait les bras levés en signe de reddition. Il était impossible encore, à l’heure où ces lignes étaient écrites, de savoir si la tragédie s’était répétée quasiment à l’identique à seulement une vingtaine de kilomètres de distance. « C’est un nouveau choc. Mais les circonstances du drame ne sont pas encore suffisamment claires pour affirmer que les deux affaires sont totalement similaires », confiait à l’Humanité le pasteur Tamy Pierson, élu démocrate à la Chambre des représentants de l’État du Missouri, qui a mis son église à disposition du Mouvement pour que justice soit faite à Michael Brown.

Selon le chef de la police de Saint-Louis, l’adolescent abattu, Vonderrit Myers, était armé et l’officier qui l’a tué aurait réagi pour se défendre. La famille Myers conteste cependant cette version affirmant que le jeune homme n’avait pas d’arme. « Il avait simplement un sandwich en main, ce que le policier a confondu avec un pistolet », affirme en larmes Teyonna Myers, une cousine de la victime présente sur les lieux. Comme pour alimenter encore un peu plus la confusion, l’officier de police n’était pas en service « public », il effectuait une mission pour une société de sécurité privée, chargée de veiller sur le quartier. Un moyen, semble-t-il légal, d’arrondir ses fins de mois. La possession de cette étrange double casquette est possible aux États-Unis et « un officier, même s’il n’est pas en service, a le droit d’intervenir quand la situation l’exige », explique Tamy Pierson.

Misère, racisme et ségrégation

Quoi qu’il en soit, le week-end s’annonce extrêmement tendu à Saint-Louis, où le Mouvement pour que justice soit faite à Michael Brown, des associations de défense des droits civils, plusieurs syndicats ont prévu « quatre jours de résistance » à partir de ce vendredi avec une grande marche jusque dans le centre de Saint-Louis samedi. Misère sociale et regains de racisme et de ségrégation conjuguent leurs effets explosifs. Comme à Los Angeles il y a vingt ans après l’acquittement de policiers blancs, pourtant pris en flagrant délit par un vidéaste amateur alors qu’ils passaient à tabac un jeune Noir. « Nous n’en sommes malheureusement plus loin », alertait Adolphus Pruitt, le président pour le Missouri de l’Association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP), dès mardi, avant donc même qu’un nouvel ado noir ait été abattu par un policier. « Une étincelle, prévenait-il, et tout peut partir en vrille. »

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