Les annonces gouvernementales ne sont susceptibles ni de prévenir les conséquences à venir de cette crise et ni de traiter ses racines.
1) Les marges de manœuvre financières dégagées depuis l’automne par les différents plans gouvernementaux - 428 milliards au total, pas mal pour un pays dont les caisses étaient soit disant vides – sont pour l’essentiel promises à reconstituer les capacités de crédit du système financier sans changer un iota aux critères d’utilisation de cet argent. Or tant que le crédit servira à soutenir les rendements financiers contre l’emploi et les salaires, la situation continuera à empirer.
2) Le plan de relance proprement dit soumis la semaine dernière par le gouvernement à l’Assemblée nationale est gravement insuffisant : tous les experts reconnaissent qu’il est l’un des moins ambitieux des pays capitalistes et que son impact sur la croissance sera très faible . Et surtout il ignore totalement la relance du pouvoir d’achat et de la consommation ( moins de 4 milliards d’euros en comptant large sur les 26 milliards annoncés), qui demeure pourtant l’un des plus sûrs moyens de tirer la croissance économique.
3) Et de surcroît, le gouvernement poursuit une politique de « réformes » qui a des effets dépressifs extrêmement graves sur l’investissement et l’emploi public. Même quand les besoins éclatent au grand jour de manière dramatique comme pour l’hôpital, le gouvernement nie ces besoins. Et dans ce cas précis, pour justifier le maintien du projet loi Bachelot , il engage même une scandaleuse campagne de stigmatisation de l’hôpital public et de culpabilisation de ses personnels, comme on l’a vu hier avec les propos du secrétaire national à la santé de l’UMP dans le Journal du Dimanche. Le dicton n’a jamais été aussi approprié : quand on veut tuer l’hôpital public, on dit qu’il a la rage. C’est totalement irresponsable !
Dans ces conditions, l’échec d’hier sera celui de demain.
La prétendue relance Sarkozy n’aura pas lieu. La politique gouvernementale continuera à être une politique de l’échec. C’est une situation dangereuse pour les salariés, pour l’ensemble du monde du travail, pour le pays. Le Part communiste est totalement décidé à combattre cette politique. C’est pour nous la priorité des priorités. Notre Conseil national vient d’appeler à la mobilisation maximum en ce sens. Il a également décidé, à la suite de premières propositions avancées par ses parlementaires la semaine dernière, de verser au débat public national des propositions pour un véritable « plan d’urgence pour combattre la crise ». Avant d’en dire un mot, je veux dire que le constat qui est le nôtre est de plus en plus partagé dans le pays. La mobilisation syndicale unitaire du 29 janvier et la plate-forme commune signée par tous les syndicats sont des signes qui ne trompent pas. A gauche, le ton semble lui aussi plus combatif et nous nous en félicitons, après avoir été parfois bien seuls à appeler à la riposte ces derniers mois.
Le Parti communiste appelle donc ses militants à être de toutes les ripostes, et à y porter des choix politiques alternatifs.
Nous tiendrons donc trois journées de mobilisation nationale les 22, 23 et 24 janvier pour faire éclater la vérité sur les dangers des prétendues mesures gouvernementales, pour organiser l’action avec les salariés, pour populariser nos propositions.
Nous serons présents durant ces trois jours dans tout le pays devant des dizaines de sites touchés par les suppressions d’emplois, devant des sièges de grandes banques, devant des grands centres commerciaux.
Le 24 janvier sera un temps fort sur la question de la santé et de la situation hospitalière. Nous voulons nous adresser largement aux usagers et les appeler à dire, aux côtés des personnels, « non au krach hospitalier, des moyens pour la vie, retrait de la loi Bachelot ! ». Nous éditons pour cela un quatre pages à plus d’un millions d’exemplaires. Au lendemain des ces trois journées, nous poursuivrons notre mobilisation durant la semaine de la mobilisation syndicale unitaire du 29 janvier, à laquelle nous apporterons tout notre soutien.
Afin de favoriser les convergences, nous nous proposons également de rencontrer dans la prochaine période les formations politiques de gauche, les organisations syndicales, les associations avant d’échanger avec elles sur la situation et les actions à envisager.
Un plan d’urgence pour combattre la crise
1) Première urgence : sécuriser l’emploi
Ce n’est pas aux salariés de payer la crise des marchés financiers. Les actionnaires veulent éponger leurs pertes et redresser au plus vite leurs rendements en licenciant, en écrasant le pouvoir d’achat, et en empochant les aides publiques. C’est au contraire à eux de mettre la main à la poche. Il faut mettre à contribution les profits et les dividendes, et mettre sous protection les salaires et l’emploi. Ne pas le faire, c’est handicaper encore toute possibilité de relance, car c’est l’emploi et non les dividendes qui crée la richesse.
Nous proposons donc :
- la suspension immédiate de tous les projets de suppressions d’emplois.
- la convocation, là où des problèmes se posent, de tables rondes quadripartites directions d’entreprises-Etat-élus-syndicats pour examiner des solutions alternatives aux politiques actuelles de réduction d’emplois ou de chômage technique . Les contre-propositions issues de ces tables rondes devraient être examinées prioritairement par les banques et les pouvoirs publics dans le cadre de l’utilisation des 428 milliards d’euros dégagés au nom de la relance.
- la mise à contribution des profits, des dividendes versés aux actionnaires, et la réduction des intérêts payés aux banques avant toute autre mesure. C’est le sens de la proposition de loi Bocquet déposée au Parlement.
- l’utilisation de crédit à taux zéro pour les PME en cas de rupture de trésorerie sous condition de renoncement aux suppressions d’emploi.
- des mesures de taxation dissuasive et de conditionnement des aides doivent être également mises en place contre les politiques de délocalisation.
2) Seconde urgence : relever fortement le pouvoir d’achat populaire.
Un relèvement conséquent des salaires, des retraites et des minima sociaux est le plus sûr moyen de la relance du pouvoir d’achat et du soutien à la consommation et à la demande.
Nous proposons donc :
- le relèvement immédiat du SMIC, des traitements de la fonction publique, du minimum vieillesse et des minimas sociaux.
- la convocation dans le premier trimestre 2009 d’une conférence nationale sur les salaires et le pouvoir d’achat, donnant le signal de négociations généralisées sur la revalorisation des salaires et des qualifications.
- une baisse significative de la TVA sur les produits de première nécessité et sur les transports.
3) Troisième urgence : relancer l’investissement
L’investissement public, en premier lieu...
En finir avec les politiques d’écrasement des dépenses publiques et sociales aurait le double mérite de répondre à des besoins criants et de créer les conditions d’une relance intérieure saine.
Cela nécessite pour commencer :
- l’’annulation des programmes massifs de suppression d’emplois publics et de rationnement des budgets publics, notamment dans l’éducation et la santé, qui devraient au contraire être des priorités en temps de crise .
- L’abandon des critères d’austérité du pacte de stabilité et la demande par la France de la renégociation en lieu et place de ce pacte d’un pacte européen pour l’emploi et la croissance.
Nous proposons également sans attendre :
- Le lancement d’un plan national d’investissement dans la santé, dont la situation hospitalière révèle l’urgence absolue, comprenant notamment un plan d’urgence emploi-formation pour pallier le déficit criant de personnels.
- Un plan pluriannuel de construction de logements publics, à loyers modérés, au rythme de 180.000 par an pendant cinq ans pour résorber le déficit accumulé par rapport aux besoins.
- La modernisation du transport ferroviaire, en particulier le lancement d’un plan fret ambitieux , indispensable au plan économique comme au plan écologique.
- La relance d’une grande politique publique de la recherche, à l’inverse du démantèlement actuel.
Cette mobilisation publique nécessite l’adoption de premières mesures fortes engageant la réorientation de la fiscalité avec notamment :
- L’annulation du paquet fiscal de l’été 2007. La modulation immédiate de l’impôt sur les sociétés pour pénaliser les entreprises qui continuerait à donner la priorité aux rendements financiers sur la préservation et la création de l’emploi.
- La baisse de la TVA sur les produits de première nécessité.
Enfin, il convient de mettre en, œuvre au plus vite :
- un plan d’aide exceptionnelle aux collectivités locales, dont l’activité est un élément essentiel de l’économie nationale, et dont l’asphyxie serait une catastrophe, avec notamment le remboursement immédiat de la TVA, la compensation des transferts et une réforme de la taxe professionnelle qui, à l’inverse de la suppression programmée par le gouvernement , dote les collectivités de ressources nouvelles.
...L’investissement privé dans l’industrie et les services, ensuite.
Alors que des moyens d’intervention publique massifs ont été dégagés, 320 milliards pour le plan de refinancement bancaire, 40 milliards pour doter la Société de prise de participation de l’Etat, et 20 milliards pour le Fonds stratégique d’ Investissement, cet argent doit servir une forte relance de l’ Industrie et des services. Les vagues de licenciement massifs actuelles sont d’autant plus inacceptables que les grands groupes maintiennent des niveaux records de taux de profits (99 milliards de profits pour les groupes du CAC 40 en 2007 et 50 milliards de dividendes distribués).
Nous proposons notamment :
- une mobilisation nationale pour la filière automobile , et la mise en place d’une charte pour une industrie automobile durable et créatrice d’emplois en Europe, permettant notamment une lutte efficace contre les politiques de délocalisations et de dumping social et salarial des constructeurs.
- la relance, en lien avec l’effort de construction et de rénovation de logements sociaux, de toute la filière de la construction et du bâtiment. Pour soutenir cette relance du logement social, L’ensemble de l’épargne populaire (Livret A, Livret B, Livret Bleu, LDD [ex Codevi] et LEP) doit être à nouveau intégralement centralisée par la Caisse des dépôts et consignation. Livrer ces ressources, après la crise, aux critères laissés intacts du système bancaire et financier est une aberration. Ce plan de relance public du logement doit notamment accompagner par des prêts bonifiés un plan de réhabilitation pour mise aux normes énergétiques, notamment du patrimoine HLM. Générateur d’emplois, il peut permettre aux organismes HLM et aux collectivités de mettre en place des conventions d’utilité sociale avec les entreprises du BTP assurant un emploi local rendu notamment possible par un plan de formation aux métiers du bâtiment.
- un plan de soutien aux PME, avec notamment l’utilisation de crédit à taux zéro en cas de rupture de trésorerie en contrepartie du renoncement aux suppressions d’emplois.
4) Quatrième urgence : contrôler et réorienter l’utilisation des 360 milliards du plan d’aide aux banques.
Nous avons avancé de nombreuses propositions à l’automne, dont celles, essentielles et pleinement d’actualité :
- de la constitution d’un pôle public et financier, à partir de la Banque Postale, d’Oséo, de la CDC, des caisses d’Epargne et de nouveaux outils d’intervention publiques crées par le gouvernement comme la Société de Prise de Participation de l’Etat qui agit aujourd’hui sans contrôle transparent.
- d’une refondation des missions et du rôle de la Banque Centrale Européenne, dont nous entendons faire une proposition forte dans le cadre de la batille des prochaines élections européennes, d’autant que la fable de l’indépendance de la BCE à l’égard des gouvernements vient de voler en éclat à la faveur de la crise financière.
Nous voulons aujourd’hui attirer l’attention sur les pouvoirs d’intervention nouveaux qui doivent être créés à tous les niveaux pour les salariés, les syndicats, les élus, les populations. Cela doit en particulier les critères d’utilisation des 360 milliards de crédits ouverts aux banques.
Nous proposons donc :
- La création de cellules de crise ou de commissions transparentes, ouvertes aux élus et aux syndicats, dans les départements ou les bassins d’emplois, pour contrôler et batailler sur l’utilisation des milliards d’euros dégagés au nom de plan de relance.
Dans le cadre de nos journées de mobilisation en janvier et par la suite, nous envisageons de saisir à ce propos les préfets et le médiateur du crédit nommé par le gouvernement .
La bataille pour savoir comment est utilisé l’argent du plan de relance et avec quels critères doit devenir une grande bataille publique.