Les néo-libéraux viennent de remporter une victoire politique et idéologique historique, la gauche est très affaiblie. Notre parti qui a souffert de son effacement à l’élection présidentielle a subi au premier tour des élections législatives un échec électoral sans précédent. Au deuxième tour, l’élection de 11 députés communistes est une bonne nouvelle; cela témoigne de notre capacité de résistance, à l’opposé du défaitisme qui a présidé à notre absence à l’élection présidentielle. Pour autant l’existence même de notre parti reste menacée alors qu'il va y avoir besoin comme jamais de ce qui fait la raison d'être originale du PCF, un PCF qu'il est urgent de transformer et renouveler profondément, à partir d'un bilan exigeant.
UN BILAN S'IMPOSE
Moment clé de cette période, le 4 novembre 2016, Pierre Laurent déclarant, avant la décision des communistes, qu'une candidature communiste « n'est pas l'option que je privilégie » prenait position publiquement en faveur du soutien à Jean-Luc Mélenchon. Cette stratégie, contraire à la décision du Congrès (selon laquelle « les communistes travaillent pleinement (…) à engager un candidat » dans le processus de désignation pour l’élection présidentielle), et maintenue malgré le vote des délégués des fédérations à la conférence nationale, a empêché la promotion de nos idées, une bataille unitaire réelle, et conduit à la catastrophe. Il est urgent d'en changer. Le conseil national des 23 et 24 juin doit ouvrir un processus de congrès incluant un travail exhaustif et collectif de bilan.
LES IDÉES COMMUNISTES : ORIGINALES, INDISPENSABLES, MAIS ABSENTES
L'élection présidentielle aurait dû être le moment de mettre dans le débat public les idées à la fois réalistes et radicales régulièrement évoquées par nos derniers congrès. Les Français les ignorent faute d’un effort persévérant, au sommet du Parti, pour leur permettre de s’en saisir. L'effacement du PCF et de l'originalité de ses propositions a aggravé cette situation, laissant place à la confusion au profit de FI, avec l'illusion entretenue que nos idées seraient quasiment les mêmes.
Le projet de sécurité d'emploi et de formation a fait cruellement défaut dans la campagne face au besoin d’une nouvelle économie pour répondre au défi des révolutions informationnelle et écologique. D'autant plus que la question de l'emploi était placée au premier rang des sujets sur lesquels les électeurs demandaient des réponses. Seuls se sont exprimés les tenants de l’ubérisation et de la flexibilité néolibérale (Macron et Fillon), ceux qui, en plus, font des migrants le bouc émissaire (Le Pen), ceux d’un « revenu d’existence » cantonné à la répartition (Hamon), et ceux pour lesquels l’embauche directe des chômeurs par l’Etat résoudrait le chômage, exonérant les entreprises et le grand patronat de ses responsabilités (Mélenchon). Et pour cause : il n’y avait pas de candidat communiste pour porter dans la campagne présidentielle la proposition de loi SEF déposée en janvier 2017 par André Chassaigne et ses collègues.
De même, nos propositions alternatives sur l’utilisation de l’argent et sur les banques auraient pu être un levier décisif pour le rassemblement d’une gauche de combat et pour la crédibilité d’une alternative novatrice ancrée à gauche. Dans la crise politique effroyable que nous vivons, elles auraient pu être une lueur d’espoir pour tous ceux qui cherchent et qui luttent.
Quant à nos propositions pour refonder la construction européenne, adoptées en conférence nationale et confirmées par notre dernier congrès, leur absence a conforté les populismes de droite et de gauche dans le paysage politique. Elle a laissé la voie libre à Macron pour pousser les feux du fédéralisme et de la domination des marchés financiers. Elle laisse à présent la voie libre à l’opposition factice entre « mondialistes et patriotes » travaillée de plusieurs côtés, effaçant les enjeux de classe et la nécessité de luttes immédiates.
DES CONDITIONS IMPOSSIBLES POUR NOS CAMARADES AUX LÉGISLATIVES
Cette absence de la bataille présidentielle a placé nos camarades aux élections législatives dans des conditions impossibles pour le premier tour, malgré le courage et l'engagement dont ils ont fait preuve. Aurait-on voulu faire une pédagogie du renoncement du PCF à son existence qu’on ne s’y serait pas pris autrement. Malgré cela, 11 communistes ont pu étre élus; ce sera un point d’appui important; mais cela n’efface pas la faiblesse historique de notre score national au premier tour des législatives (3,8 % en France métropolitaine), qui risque d’avoir des conséquences de longue durée si on ne s’attaque pas sérieusement aux problèmes posés.
Dans cette situation, quelle est la nouvelle étape qu’il nous faut engager ?
Le quinquennat Hollande a précipité la destruction de la gauche. Le dispositif électoral de Macron et celui de Mélenchon, permis par notre absence, conduisent à sa désintégration. Pas question de se résigner à cette situation si dangereuse pour notre peuple.
TRANSFORMER ET RÉORIENTER LE PCF
Pour le combat face au nouveau pouvoir et pour une perspective de progrès, il y a absolument besoin de l'apport d'un PCF révolutionnaire, profondément transformé, autonome, émancipé des idées dominantes, se nourrissant des apports de Marx et de ses successeurs, portant le débat sur les rapports de classes et de domination, pour s’en émanciper en dépassant le capitalisme et le libéralisme.
Ni repli identitaire, ni dilution, cette réorientation est indispensable pour aider au développement des luttes et à leur convergence sur des alternatives. Elle est indispensable pour un rapport créatif avec les mouvements sociaux et citoyens qui sont un ferment de transformation de notre société. Elle est indispensable à la refondation de la gauche en France, en Europe et dans le monde, avec des rapports nouveaux et de nouveaux types d'alliances entre les forces qui la composent, rompant avec les logiques de sommet, respectueux de leur diversité, en capacité d’initiatives et ouverts à l’expérimentation décentralisée. C’est une réflexion et une expérimentation qu’il nous faut engager. Dès à présent nous avons à organiser une riposte rassembleuse avec toute la gauche, écologistes, socialistes de gauche, insoumis, syndicalistes, mouvements associatifs, etc... pour laquelle il est décisif de faire vivre l’autonomie effective d’idées et d’initiative de notre parti.
EXPLORER UN CHEMIN DE RÉVOLUTION PACIFIQUE
La France, l’Europe, le monde ont besoin d’une révolution pacifique. Dans le capitalisme financier mondialisé, elle passera nécessairement par des prises de pouvoirs du monde du travail et de la création sur les banques, la BCE, le FMI. Au lieu de s’aligner sur le populisme et l’électoralisme, nos positions dans les institutions doivent contribuer à ces prises de pouvoir. Il nous faut rouvrir ce chantier pratique et théorique. Cela concerne aussi notre action politique dans les entreprises. Ce travail et cette réorientation ne pourront être menés à bien que sous l’impulsion d’une direction nouvelle prête à s’y engager avec conviction, capable de s’autocritiquer, soucieuse de l’organisation, de la créativité et de l’unité du Parti.
POUR UN CONGRÈS EXTRAORDINAIRE ET UN COLLECTIF DE DIRECTION PROVISOIRE
Tout cela doit être l’objet d’un congrès extraordinaire au printemps 2018. Il partirait des remontées des communistes depuis leurs sections, dont une assemblée des délégués de section à l'automne ferait le bilan. Un collectif de direction provisoire devrait être mis en place par le Conseil National pour la préparation démocratique du congrès sous la maîtrise effective des communistes et pour l'animation des luttes politiques face à Macron.