En 1980, le Conseil européen de Venise créait l’évènement
en affirmant le droit à l’autodétermination du peuple palestinien. En 1995, l’Union européenne suscitait à nouveau l’espoir en lançant, à Barcelone, le «
partenariat euroméditerranéen ». Depuis, bien des attentes ont été déçues parmi les amis de l’Europe dans cette région du monde, si proche par la géographie et par l’histoire. Pourtant,
le monde a besoin de l’Union européenne pour promouvoir le dialogue contre l’arrogance, le respect contre le mépris, le droit contre la force. Il est aujourd’hui plus vital que jamais que l’Europe exprime à-nouveau sa volonté et se donne les moyens de jouer ce rôle.
La Méditerranée est une mare nostrum entre riverains et non le champ d'expérimentation des desseins américains.
Au Liban comme en Palestine, l’armée israélienne – et, à travers elle, les forces les plus dangereuses qui détiennent le pouvoir aux Etats-Unis –
mènent une guerre aux conséquences dévastatrices pour les peuples concernés et, au-delà, pour l’avenir du monde. Cette guerre – ainsi que les militaires israéliens le reconnaissent eux-mêmes – était programmée de longue date. Condoleezza Rice ne dit pas autre chose en osant assimiler les souffrances des Libanais aux « douleurs de l’enfantement du nouveau Moyen-Orient ».
L’Europe peut-elle accepter une telle « construction » sur les cadavres des victimes innocentes et les ruines des villes et des infrastructures qu’elle a elle-même, parfois, contribué à édifier ?
L’Europe peut-elle accepter le torpillage systématique des tentatives d’intégration dans des structures démocratiques d’organisations armées portées au pouvoir par le suffrage universel ? Peut-elle accepter qu’un châtiment collectif soit infligé aux peuples qui n’entendent pas se plier à cette prétention dominatrice ? Peut-elle accepter l’enlèvement et l’emprisonnement de 40 ministres et parlementaires palestiniens, démocratiquement élus, parmi lesquels le président du Conseil législatif lui-même dont le mauvais traitement a nécessité l’hospitalisation d’urgence !
Peut-elle accepter qu’un Etat puisse impunément violer toutes les résolutions du Conseil de Sécurité le concernant et afficher son mépris de l’ONU au point de « viser délibérément » - selon les termes de Kofi Annan – et de tuer des observateurs de la force internationale de maintien de la paix ? Peut-elle accepter de se laisser paralyser au point de ne pouvoir exiger un cessez le feu immédiat et inconditionnel après plusieurs semaines d’un conflit aussi acharné ? L’Europe peut-elle, en un mot, accepter sans réagir le retour à un ordre mondial qui institue le recours à la guerre comme instrument de règlement de conflit.
Ne laissons pas se développer une stratégie dont le fiasco américain en Irak montre dans quelle dramatique impasse elle peut conduire le monde ! Ne laissons pas le 21ème Siècle devenir celui de la guerre entre les civilisations ! L’Europe est placée, à cet égard, face à des responsabilités historiques. Celles des Chefs d’Etats et de gouvernement européens vont très au-delà de leur engagement présent ! Ce que nous attendons d’eux, c’est :
• L’appel à un cessez-le-feu immédiat et sans condition, tant au Liban qu’en Palestine, au retrait de l’armée israélienne sur la « ligne bleue », à la levée du blocus imposé à ces deux peuples, ainsi qu’à l’aide au retour dans leur foyer des personnes déplacées en raison des combats ;
• Une condamnation claire – au nom du droit, égal pour tous – de la guerre menée par Israël contre le peuple libanais comme contre le peuple palestinien et des crimes de guerre tel celui perpétré à Cana ;
• Un appel à ouvrir des discussions sur l’échange des prisonniers entre le Liban et Israël, dans le cadre des Conventions de Genève, comme l’a demandé le gouvernement libanais, et à l’arrêt durable des tirs de roquettes du Hezbollah sur Israël ; et parallèlement à accepter la proposition de dialogue du Président palestinien, Mahmoud Abbas, en vue de la libération des « prisonniers de guerre » détenus par Israël ainsi que de celle du soldat israélien capturé par les palestiniens, et en vue de mettre fin aux tirs de missiles de Gaza sur Israël ;
• Des précisions sur la nature du mandat confié à la force internationale sous l’égide de l’ONU envisagée au Sud Liban, qui ne doit en aucun cas se transformer à son tour en force d’agression, et doit être déployée des deux côtés de la frontière : la sécurité est un droit inaliénable pour tous les peuples de la région ! La pleine application de la résolution 1559 exige, quant à elle, un contexte régional apaisé, dans lequel toutes les décisions des Nations unies sont prises en considération.
• Un rappel de l’ensemble du droit onusien sur le conflit israélo-arabe, afin de placer chacune de ses dispositions particulières dans son contexte global ;
• La demande de l’ouverture de négociations sur cette base, et sous l’égide des Nations Unies, avec la participation de tous les pays et Autorités de la région ;
• Une renonciation solennelle à tout recours à la guerre comme moyen de régler les conflits à venir.
Nous appelons quiconque en accord avec ces principes à se joindre à notre appel, car nous voulons encore croire à un partenariat euro-méditerranéen fondé sur la générosité, le co-développement, le partage des cultures et au rôle de l’Europe pour un monde de paix.
(Les signatures sont à adresser à : Francis WURTZ
Président du groupe de la Gauche unitaire européenne au Parlement européen
francis.wurtz@europarl.europa.eu )