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Entre les députés godillots du PS et les députés communistes et apparentés il y a un monde d'écarts. Les députés communistes et apparentés mènent de front cette lutte pour sauver les retraites. Interventions sur l'article 3 de Jacqueline Fraysse (app-PCF) députée des Hauts de Seine, de Patrice Carvalho député PCF de l'Oise, de Gaby Charroux député PCF des Bouches du Rhône, de Jean Jacques Candelier député PCF du Nord, de Marc Dolez député ex-PG du Nord, d'André Chassaigne député PCF du Puy-de-Dôme, Président du groupe GDR


Retraite : La bataille de tranchées des députés communistes contre le projet de loi PS (3ème partie)
Mme Jacqueline Fraysse. Cet article instaure un mécanisme de pilotage de notre système de retraite qui s’appuie sur le Conseil d’orientation des retraites et sur la création d’un Comité de surveillance des retraites. Cette nouvelle instance sera désignée comme pivot du système de pilotage des retraites. Sur les bases des rapports du Conseil d’orientation des retraites, elle émettra chaque année des recommandations, qui pourront notamment porter sur l’évolution de la durée d’assurance requise pour une pension à taux plein, sur une éventuelle mise à contribution du Fonds de réserve des retraites, ou sur le niveau du taux de cotisation d’assurance vieillesse, de base et complémentaire.

Ces prérogatives, si elles étaient adoptées, poseraient le premier jalon d’une réforme systémique, permettant de passer d’un système à prestations définies à un système à cotisations définies.

En outre, la composition de ce comité pose question : il s’agit en effet d’une instance composée de cinq personnalités qualifiées, nommées pour cinq ans par décret, et dont le président sera nommé en conseil des ministres. Les parlementaires en sont exclus et seront simplement tenus informés des suites que le Gouvernement entend donner aux recommandations dudit comité.

Pour notre part, nous refusons l’expertise comme légitimation dans la prise des décisions en politique d’une manière générale, et particulièrement en matière de retraites. Cet article est préoccupant à plus d’un titre, à la fois pour la démocratie et pour le niveau des pensions, qui deviendrait ainsi une variable d’ajustement.

M. Jean-Jacques Candelier. Cet article instaure un mécanisme dit de « pilotage de notre système de retraites ». Un comité de surveillance pourra ainsi faire des recommandations sur l’évolution de la durée d’assurance – et donc recommander d’allonger cette durée plus rapidement que prévu dans la loi –, le niveau des cotisations et le taux de remplacement.

Ces prérogatives poseraient en outre le premier jalon d’une réforme systémique permettant de passer d’un système à prestations définies à un système à cotisations définies. Par ailleurs, la représentation nationale ne saurait déléguer à un comité d’experts le soin de faire la politique en matière de retraites.

Il est grave et irresponsable pour le Gouvernement de chercher à réduire les choix politiques, notamment des choix aussi lourds que le départ à la retraite ou le niveau de pension, à une simple « gouvernance », aux « paramètres » d’une équation mathématique. Nous sommes à la frontière de la démocratie et de la technocratie. Ce n’est pas en s’en remettant à des technocrates que l’on renforcera la confiance des Français dans leur système de protection sociale !

Si le Gouvernement souhaite en finir avec le pilotage à vue du système de retraites, qu’il commence déjà par retirer ce projet de loi. Enfin, cette disposition n’a fait l’objet d’aucun débat avec les Français et va totalement à l’encontre des engagements de campagne. Les organisations syndicales ont relevé que cette réforme, au travers de son article 3, n’était en réalité qu’un gage de plus donné dans l’urgence aux marchés financiers et à la Commission européenne. La création d’un nouveau comité, qui échappe à tout contrôle parlementaire mais qui dictera la marche à suivre au Gouvernement pour que les objectifs assignés aux systèmes de retraites soient respectés, au premier rang desquels la pérennité financière, est inacceptable.

M. Marc Dolez. La mise en place de ce comité est extrêmement dangereuse, en ce qu’elle conduira à marginaliser encore davantage les représentants des assurés sociaux dans les caisses de retraite et, qu’on le veuille ou pas, à réduire de fait le rôle du Parlement. Par cet outil, le Gouvernement contraindra le système de retraites à respecter à tout prix une trajectoire financière, prétendument vertueuse, autrement dit à entrer dans le cadre de normes dogmatiques d’équilibre financier. Il est évident que l’unique objectif de ce comité sera financier.

Pour ce qui est des recommandations, l’alinéa 18 de l’article 3 prévoit que les experts pourront proposer d’allonger encore la durée de cotisation sans que soit mentionnée la moindre limite. Il est prévu à l’alinéa 25 qu’ils puissent proposer d’utiliser le taux de remplacement comme une variable d’ajustement sous la seule réserve de ne pas descendre en dessous d’un plancher qui sera fixé par décret. Lequel sera-t-il ? Ce comité d’experts pourra également, selon l’alinéa 24, inciter à élever le taux de cotisations pour apporter des ressources en sus au régime, mais sans pouvoir dépasser un plafond lui aussi fixé par décret.

Même si les choses ne sont pas dites aussi franchement, il s’agit bien là d’un comité technocratique. Quatre personnes nommées par décret, le président nommé en conseil des ministres ! Qu’on le veuille ou non, ce comité sera forcément sous la tutelle de l’exécutif, sous ses ordres, ce qui permettra au Gouvernement de se défausser. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDRUMP.)

M. André Chassaigne. Cet article 3 est extrêmement important. La majorité socialiste nous demande une forme d’acte de foi sur son contenu, car nous n’en avons pas la même exégèse.

Nous considérons que la mise en place de ce comité de surveillance est antidémocratique. Nous avons expliqué pourquoi : quatre personnalités nommées par décret, un président nommé en conseil des ministres, une instance non élue, aucun représentant du peuple, une mission définie dans le texte de loi qui dispose « Le comité adresse au Gouvernement des recommandations ». C’est vrai, ces recommandations ne sont pas des injonctions, mais il est précisé qu’elles s’imposeront comme un élément essentiel du débat public. Le risque est grand que la parole de ce comité l’emporte sur des décisions qui pourraient être prises par la représentation nationale.

Il y a des précédents, comme le Haut conseil des finances publiques qui dicte au Parlement les orientations en matière de finances publiques, ou encore la Commission européenne qui dicte la politique économique et sociale de la France. Aujourd’hui, on crée un comité de surveillance des retraites.

Mais, derrière tout cela, il y a autre chose qui, à notre avis, est plus grave et qui a été souligné par plusieurs intervenants. Notre système de retraites risque une véritable remise en cause. Ce système, hérité du Conseil national de la Résistance, de la grande loi du lendemain de la dernière guerre mondiale, s’appuyait sur un système par répartition à prestations définies. C’était un pourcentage du salaire qui fixait le montant de la retraite, les cotisations étant ensuite fixées pour pouvoir atteindre les prestations considérées comme prioritaires.

En l’occurrence, nous passons à un système complètement différent. Nous passons d’un système par répartition à prestations définies à un système à cotisations définies. Ce qui veut dire que les cotisations sont fixées et qu’à partir de là, on considère le montant des retraites comme la variable d’ajustement. Il y a, derrière tout cela, une modification extrêmement importante du système des retraites et, pour faire le boulot, vous mettez en place ce comité de surveillance.

M. Patrice Carvalho. Cet article 3, sous les dehors d’une simple réforme de la gouvernance, est le réacteur nucléaire de votre projet de loi, et je vais vous le démontrer.

Le comité de surveillance des retraites qui est institué constitue une réforme systémique de notre système de retraites. C’est tout simplement le moyen d’en finir avec le modèle solidaire, universel et par répartition de notre système.

Pourquoi ? Parce que composé d’experts prétendument indépendants, ce comité aura pour mission d’assurer l’équilibre financier à moyen et long terme, en faisant évoluer en permanence les paramètres, les critères et les modes de calcul des pensions. C’est écrit noir sur blanc dans l’article 3, et c’est détaillé dans l’exposé des motifs du projet de loi.

En effet, les conclusions du comité, baptisées « recommandations », à l’instar de celles de la Commission européenne, seront transposées sans négociation ni débat public national dans les lois de financement de la sécurité sociale. Cela vise, de l’aveu même du Président de la République lors de la conférence sociale, à « éviter une réforme tous les trois ou quatre ans ». Pour ce faire, durée de cotisation, âge légal ouvrant droit à pension, niveau de la pension servie, modalités d’indexation seront constamment évolutifs.

On le voit, cet article tend une épée de Damoclès au-dessus de notre système. C’est l’institutionnalisation du pilotage à vue. C’est une nouvelle « règle d’or » nationale, qui entraînera des correctifs permanents au régime général. Ce cheval de Troie, profondément antidémocratique, entérinera définitivement le plafonnement systématique des pensions servies, au nom de l’équilibre des comptes, pour le plus grand bonheur des complémentaires privées.

C’est la raison pour laquelle nous refusons ce comité de « surveillance » des retraites, dont le nom indique suffisamment la sinistre mission.

M. Gaby Charroux. Comme viennent de le dire mes collègues, l’article 3 du projet de loi entend en finir avec – je cite – « le pilotage à vue » de notre système de retraites. C’est plutôt une bonne ambition. Il s’appuie pour cela sur le Comité d’orientation des retraites et crée ce fameux Comité de suivi des retraites en lieu et place du Comité de pilotage.

Il est à craindre, au regard des prérogatives données à ce comité, qu’une approche purement comptable et technocratique prenne le pas sur la consultation paritaire et la souveraineté du Parlement. En effet, ce comité aura le pouvoir de recommander, entre autres, l’utilisation du Fonds de réserve des retraites ou l’allongement de la durée de cotisation au regard de l’espérance de vie. Nous y revoilà !

Un décret encadrera les recommandations en matière d’augmentation du taux de cotisation, tout autant que de réduction du taux de remplacement.

L’encadrement, par décret, des recommandations citées laisse croire que les propositions de ce comité de suivi vont au-delà de simples recommandations. Sinon, pourquoi les encadrer ?

Nous voyons là un véritable risque de confiscation de la démocratie sociale et parlementaire et nous y sommes fermement opposés. Il s’agit donc de ne plus naviguer à vue, certes, mais de confier le gouvernail à un comité réduit avec, comme boussole, les dogmes négatifs qui président à cette réforme.

Permettez-moi, mes chers collègues, d’appeler votre attention sur le risque que comporte la mise en place d’un tel dispositif, que, bien sûr, nous regrettons.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 3 met en place un énième comité qui vient remplacer un comité de pilotage encore tout jeune mis en place lors de la réforme de 2010. Il s’agit là d’un comité purement technocratique, qui comme tel échappera à tout contrôle démocratique. Il dictera pourtant au Gouvernement la marche à suivre pour que la réduction des déficits soit respectée. En réalité, l’article 3 est très important et extrêmement préoccupant, car il pose sans le dire les bases d’une réforme systémique en remettant en cause la solidarité et la prestation définie, qui sont des points essentiels de notre système. Nous proposons pour notre part la mise en place d’une maison commune des régimes de retraite permettant un réel pilotage démocratique de l’ensemble des régimes et le règlement de la situation des polypensionnés. Malheureusement, notre amendement en ce sens contredit l’article 40 de la Constitution. C’est dommage car il aurait sans aucun doute emporté l’adhésion de tous nos collègues, socialistes, écologistes et radicaux à tout le moins.

En effet, la maison commune des régimes de retraites que nous proposions était composée démocratiquement, aux deux tiers de représentants élus de salariés actifs et retraités, au tiers restant de représentants élus des employeurs et de représentants désignés par l’État. Comme vous le voyez, la composition de notre maison commune des régimes de retraites tranche considérablement avec ce comité de surveillance composé de quatre personnalités nommées par décret et d’un président nommé en conseil des ministres. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 3.

M. André Chassaigne. Je voudrais d’abord revenir sur les explications apportées par Mme la ministre sur la nature des recommandations du comité de surveillance – des recommandations qu’elle estime strictement encadrées. Certes, les alinéas 23 à 25 de l’article 3 précisent que les recommandations ne peuvent tendre à « réduire le taux de remplacement assuré par les pensions », mais il ne faut pas oublier la fin de cette phrase : « en deçà de limites fixées par décret. » C’est justement là que nous voyons un risque, car les limites dépendront de ceux qui seront aux manettes, si je puis dire et pourront donc être modifiées à tout moment de manière très importante.

Comme l’a très bien expliqué Jacqueline Fraysse, la maison commune que nous proposons – extrêmement démocratique de par sa composition et son fonctionnement – a des objectifs, en particulier celui d’un socle commun minimum constitué de prestations précisément définies. Ainsi, notre proposition permet de garantir une carrière complète dès 60 ans, un taux de remplacement minimum de 75 % du salaire d’activité, avec un plancher égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance, net de cotisations retraite ; elle permet également de garantir la parité d’évolution du pouvoir d’achat des pensions et des salaires, en revalorisant les pensions sur la base de l’évolution du salaire moyen de l’ensemble des salariés. Notre démarche est donc totalement différente de celle du Gouvernement en ce qu’elle prévoit la fixation d’objectifs, qui pourront être atteints grâce à des leviers – essentiellement le niveau de cotisation.

M. Marc Dolez. Notre amendement de suppression se justifie par un certain nombre de raisons de fond. Premièrement, il subsiste des zones d’ombre en dépit de vos explications, madame la ministre. J’ai entendu ce que vous avez dit au sujet du nombre de décrets, qui vous paraît raisonnable compte tenu du texte auquel ils se rattachent, mais la question n’est pas tant le nombre de décrets que l’importance de leur contenu. Ainsi, les alinéas 23 à 25 montrent que le Gouvernement entend fixer par décret le plafond d’augmentation du taux de cotisation ou le plancher de réduction du taux de remplacement, ce qui n’est pas rien ! Ce n’est qu’ensuite que le comité de suivi, placé sous la tutelle du Gouvernement, fera ses recommandations, dans le cadre du décret : CQFD…

Deuxièmement, il me paraît difficile de soutenir comme vous le faites, madame la ministre, que le comité sera indépendant, dans la mesure où il est nommé par décret par le Gouvernement et où son président est nommé en conseil des ministres.

Par ailleurs, je vous fais remarquer qu’en l’état actuel du texte, le président du comité n’est pas nommé pour une durée précise. Est-ce donc à dire qu’il est révocable à tout moment ? En tout cas, ce qui est sûr, c’est que le comité ne sera soumis à aucun contrôle parlementaire.

Troisièmement, on nous dit que le Gouvernement ne sera pas tenu de suivre les recommandations et avis du comité. Mais dans la pratique, on imagine difficilement que le Gouvernement puisse outrepasser ces recommandations et avis, visant à assurer la pérennité financière – un terme parfaitement flou qui, à nos yeux, ne signifie que la réduction des déficits par de nouveaux reculs sociaux. En tout cas, il est difficilement concevable que le Gouvernement ne se serve pas du comité, au moins pour lancer des ballons d’essai destinés à préparer l’opinion à de nouveaux reculs.

Il est, enfin, une quatrième raison de fond pouvant justifier, à nos yeux, que l’ensemble des parlementaires, tous groupes confondus, adopte cet amendement de suppression : je veux parler du fait que la représentation nationale ne devrait pas déléguer à un comité d’experts le soin de faire la politique en matière de retraites.

M. Patrice Carvalho. L’exposé des motifs de l’article 3 est très clair au sujet de l’institutionnalisation du pilotage à vue de notre système de retraites selon des critères exclusivement comptables. Il évoque d’abord les fameuses « recommandations » du comité de surveillance : celles de la Commission européenne ne vous suffisaient donc pas, il vous fallait en inventer l’équivalent national ! Ces recommandations « ne pourront conduire à baisser le taux de remplacement (…) en deçà d’un plancher ». Cela veut dire qu’il est dans l’attribution du comité de baisser le taux de remplacement, c’est-à-dire le niveau des pensions. Ce comité est donc un comité d’appauvrissement des retraités !

Il est clair que l’unique objectif de ce comité de surveillance est financier, loin de toute préoccupation en matière d’emploi, de pouvoir d’achat des salariés et des retraités, de progrès social, de disparition des inégalités hommes-femmes – et je ne parle pas même de sa composition et de son fonctionnement, peu démocratiques par rapport à la maison commune que nous proposons, comme mes collègues l’ont dit avant moi.

C’est, encore une fois, le déficit de notre système de retraite qui est en ligne de mire. Or, il faut remarquer que, s’agissant de nos régimes de retraites, le terme de « déficit » est impropre. Il s’agit là d’une sémantique mensongère imposée par la doxa libérale, car notre système de retraites est en fait un système redistributif, déficitaire par nature : ses recettes n’ont jamais été connectées avec ses dépenses. Parler de déficit est donc une absurdité purement idéologique. Il faut en finir avec ce mythe : la retraite ne peut pas et ne doit pas être une affaire de calculs et de pseudo-équilibre financier. La retraite pour tous a un coût, et c’est la collectivité qui doit l’assumer, dans la solidarité. C’est le principe même de tout notre système de sécurité sociale, mis en place par les communistes au sortir de la guerre. Cet article étant tout simplement hors sujet, nous en demandons la suppression.

M. Gaby Charroux. Plusieurs raisons justifient notre amendement de suppression de l’article 3. J’en exposerai quatre. Premièrement, le comité de surveillance mis en place par l’article 3 n’est pas indépendant, puisque directement placé sous la tutelle du Premier ministre. Ses recommandations seront donc nécessairement marquées par cette dépendance et pourront être entachées de profondes contradictions au gré des alternances gouvernementales. Or, le pilotage des régimes de retraites requiert, au contraire, une vision de long terme autour d’objectifs et de moyens définis démocratiquement avec les assurés sociaux.

Deuxièmement, les partenaires sociaux représentant les forces vives de la Nation devraient eux-mêmes pouvoir produire des analyses et des recommandations à l’intention de la représentation nationale.

Troisièmement, notre système de retraites, amené à fonctionner à cotisations définies, ajustera en permanence le montant des pensions versées ou en cours de constitution au montant des ressources perçues ou projetées, compte tenu du plafonnement des cotisations. Dans un contexte d’accroissement du nombre de retraités et de leur espérance de vie, il s’ensuivra un décrochage continu et majeur du taux de remplacement du salaire par les pensions de retraite, à moins de prétendre maintenir les actifs dans l’emploi à un âge irréaliste.

Quatrièmement, enfin, cet article porte atteinte au pilotage paritaire des régimes de retraite complémentaires, en particulier l’ARRCO ou l’AGIRC. Les partenaires sociaux s’en trouvent de fait dessaisis, puisqu’ils ne peuvent actionner le levier des ressources comme ils l’entendent, alors que ces régimes sont pourtant de droit privé. Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, nous demandons la suppression de l’article 3.

M. Patrice Carvalho. Ces mesures de recul de l’âge de la retraite ou d’allongement de la durée de cotisation ont des effets délétères, inadmissibles sur le terrain. Nous recevons de plus en plus de lettres, de demandes de rendez-vous de la part de personnes âgées qui viennent demander un petit boulot. Cela m’arrive régulièrement. Je vous livre le témoignage, qui remonte à la semaine dernière, d’un responsable des ressources humaines de Renault : d’anciens collègues, âgés de 62, 63 ou 64 ans viennent lui demander des petits boulots, ménage ou photocopies. Qui peut accepter cela ?

De 2008 à 2011, selon l’INSEE, le chômage des personnes âgées de 55 à 64 ans a crû de deux points. Il ne cesse d’augmenter. Sous l’effet des reculs successifs des droits de départ en retraite dus aux différentes réformes menées depuis 1993, mais aussi sous l’effet de la disparition des dispositifs de retraite anticipée ou progressive, à l’heure actuelle, un salarié sur deux qui liquide ses droits à la retraite est hors emploi. Pire, chaque recul social en matière de retraite, que ce soit l’allongement de la durée de cotisation ou le recul de l’âge légal de départ, aggrave cette situation.

Selon l’UNEDIC, le recul de l’âge légal de départ à la retraite, décidé en 2010, a eu pour conséquence d’augmenter de 30 000 le nombre de chômeurs inscrits dans la catégorie des seniors. D’autre part, ces mesures rompent le pacte de solidarité intergénérationnelle qui veut que les seniors, en contrepartie de leur retraite, laissent leur place aux plus jeunes. Il nous semble indispensable que l’avis annuel rendu par le comité de suivi des retraites porte également sur les conséquences de cette politique injuste sur le chômage, et plus particulièrement celui des jeunes et des seniors. Tel est l’objet de cet amendement.

M. Gaby Charroux. Pour nous, la crise du capitalisme et les difficultés de l’économie française ne sont pas dues au coût du travail mais au contraire au coût exorbitant que fait subir le capital à la société. En trente ans de néolibéralisme, la part dévolue aux actionnaires aux dépens des salaires et de la protection sociale n’a cessé d’augmenter. Pour comble, malgré la baisse du taux de marge des entreprises en cette période de crise, les dividendes servis continuent d’augmenter. Par exemple, en 2012, les entreprises ont distribué environ 230 milliards d’euros de profits, ce qui représente un surcoût du capital de 100 milliards par rapport aux normes des années 1970 et 1980. Tout cela se fait au détriment de l’investissement, de la recherche et de l’emploi : aujourd’hui, 80 % des bénéfices vont aux actionnaires, contre 30 % seulement dans les années 1980.

C’est pourquoi le présent amendement propose que le comité institué par l’article 3 de ce projet de loi donne son avis éclairé sur l’évolution du rapport entre la contribution du capital et celle du travail au financement de la protection sociale, et sur la répartition et la destination des richesses issues de l’activité économique. Cela permettrait entre autres de redonner confiance aux assurés dans notre système de protection sociale ainsi que dans les décisions prises par leurs élus et le Gouvernement pour assurer la solidarité et la redistributivité du système ainsi que le maintien, voire l’amélioration de leurs droits.

Mme Jacqueline Fraysse. Les avis et rapports sur la situation comparée des femmes et des hommes au regard de l’assurance vieillesse sont légion, notamment ceux qui décrivent et analysent les différences de montants de pension, de durée d’assurance ou d’impact des avantages familiaux de vieillesse sur le montant des pensions. De même les causes de ces inégalités avérées sont connues depuis longtemps. Nous en débattons souvent ici même. Pourtant, aucune disposition courageuse et réellement efficace n’y a remédié jusqu’ici.

Le présent amendement propose donc de rendre l’information plus transparente, je dirais même plus publique, en confiant au Comité de suivi institué par l’article 3 le rôle d’émettre un avis sur les mesures politiques et les moyens mis en œuvre pour l’abolition des inégalités salariales et professionnelles entre les femmes et les hommes.

Le COR lui-même souligne que les écarts de pensions et de salaires ne se résorberont pas spontanément, sans mesure volontariste. Il convient donc d’éclairer les décisions gouvernementales et leurs effets d’un jour nouveau, pour redonner confiance à nos concitoyennes dans les décisions prises et aider les gouvernements à prendre toutes les mesures nécessaires afin d’abolir ces inégalités insupportables, particulièrement dans une grande démocratie comme la nôtre.

M. Marc Dolez. Permettez-moi, à l’occasion de la défense de cet amendement, de contester un argument précédemment développé par le rapporteur : monsieur le rapporteur, il n’y a pas de contradiction dans notre conduite ! Nous nous sommes d’abord opposés à la création du Comité, pour tout un ensemble de raisons de fond que nous avons évoquées tout à l’heure. Mais une fois ce débat terminé et nos amendements de suppression repoussés, il fallait faire des propositions ! Puisque ce comité sera constitué, nous souhaitons qu’il fasse les recommandations les plus éclairées possible. Cela n’a rien de contradictoire !

M. Patrice Carvalho. Les précédentes réformes des retraites, loin de parvenir à endiguer la paupérisation des retraités, et notamment des femmes, l’ont aggravée. Une nouvelle détérioration se prépare : en effet, contrairement aux précédentes réformes, celle qui nous est présentée met à contribution les retraités. Elle reporte ainsi d’avril à octobre la revalorisation des pensions et inclut dans l’assiette de l’impôt sur le revenu, cela figurera dans le projet de loi de finances, les majorations de pensions des retraités ayant élevé trois enfants ou plus.

Au-delà de l’impudence qu’il peut y avoir à suggérer que les retraités auraient été épargnés jusqu’ici, on peine à comprendre en quoi le fait de diminuer encore leur pouvoir d’achat relèverait de l’équité. Tout cela pèsera plus lourdement sur les retraités les plus modestes, en majorité des femmes, qui consacrent la quasi-totalité de leurs revenus à la consommation.

Selon un rapport de la Commission européenne, la France est déjà au sixième rang, parmi les vingt-neuf pays européens, pour ce qui est de l’importance des écarts de pensions entre les sexes. Et l’évolution ne va pas dans le bon sens : en France, cet écart s’est creusé de 10% en cinq ans.

La Commission européenne, qui n’en est plus à un paradoxe près, continue de préconiser l’allongement de la durée de cotisation, tout en attirant l’attention sur ses effets néfastes. Deux mesures, indique-t-elle, ont toutes les chances d’avoir un effet disproportionné sur les femmes : la retraite par capitalisation, encore peu développée en France, et l’augmentation du nombre d’années travaillées. Cette dernière mesure pourrait avoir des effets indésirables à moyen terme et entraîner une réduction du montant des pensions. Un nouvel allongement du nombre d’années travaillées est pourtant prévu dans ce projet de loi !

Oui, il est important que le comité de suivi analyse l’effet des choix politiques en matière d’égalité entre femmes et hommes. Ne pas voter un tel amendement serait un très mauvais signal.

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