Au terme de sept années d’occupation militaire, les victimes civiles se comptent par milliers, le quotidien est synonyme d’insécurité pour les citoyens afghans, les talibans refaisant surface dans l’Est et dans le Sud du pays. L’Afghanistan constitue toujours un foyer de violence, une base arrière du terrorisme international. Si cette guerre avait été en partie éclipsée par celle menée contre l’Irak, elle revient aujourd’hui sur le devant de la scène, parce que les troupes d’occupation rencontrent des difficultés croissantes sur le terrain.
Les talibans, loin d’être anéantis, ont renforcé leurs capacités de résistance et les forces militaires présentes sur place, y compris les forces françaises, s’épuisent à les poursuivre. Les bombardements aériens tuant civils, femmes et enfants, dressent la population contre l’occupation du pays et donnent un relent néocolonial à cette guerre qui ne veut pas dire son nom. Un scénario que la France connaît malheureusement que trop bien. L’histoire ne se répète pas, mais ses pages sombres se font écho. Il se reproduit en Afghanistan ce que les Français ont vécu en Indochine puis en Algérie. Plus que partout ailleurs, il est impossible, en raison notamment de la géographie et de l’organisation ethnique et clanique de la société afghane, qu’une armée d’occupation l’emporte durablement en Afghanistan.
Croire que l’invasion de l’Afghanistan permettra d’imposer le modèle occidental est un pur fantasme. La démocratie ne se décrète pas. Elle se conçoit et se construit, par les peuples eux-mêmes, suivant un long cheminement. Plus largement, toute évolution de la condition féminine, des moeurs et du système de valeurs de la société afghane ne peut se faire qu’avec la volonté du peuple afghan, aidé en cela par toutes les forces progressistes. D’autant plus que les principales manifestations du modèle occidental sur le sol afghan sont morbides : occupation par une armée ultra moderne synonyme de mort et de destruction.
Au contraire, la présence de l’armée d’occupation a contribué à accroître les tensions et mène tout droit à l’enlisement, car elle n’offre aucune perspective de règlement politique et diplomatique de la situation.
Dans ce contexte militaire et sécuritaire, la reconstruction de la société afghane n’apparaît aucunement. La question semble être reléguée au second plan. L’économie de la drogue est plus que jamais fleurissante et maintien une partie non négligeable de la population dans une situation de dépendance. L’élite nationale en place avec la bénédiction de l’administration Bush reste rongée par la corruption qui gangrène l’État afghan dans son ensemble.
En ayant décidé, en avril dernier, sans vote du Parlement, le renforcement de sa présence militaire en Afghanistan, la France s’est engagée dans une impasse et un engrenage dangereux non seulement pour nos soldats mais aussi pour notre pays. Des décisions graves sont prises par l’exécutif, au nom d’une politique extérieure calquée sur celle de la Maison Blanche. Des décisions dont dépend la vie de nos soldats. Pour qui et pourquoi combattent-ils ? Une question simple face à laquelle le chef de l’État reste confus, évasif ne répondant qu’à coup d’arguments d’autorité.
C’est également en vertu de ce suivisme et de cet alignement aveugle sur l’administration américaine, que Nicolas Sarkozy a décidé d’engager de nouvelles troupes, et qu’aujourd’hui, il demande à la représentation nationale d’autoriser la prolongation de l’engagement de nos militaires sur place. Et ce, alors même que l’objectif précis justifiant la présence française en Afghanistan échappe encore à bon nombre de nos concitoyens !
Il est grand temps d’organiser une sortie de crise. Les député-e-s communistes et républicains, opposés à l’autorisation de prolongation de l’intervention des forces armées en Afghanistan, considèrent qu’il faut, sans plus tarder, penser et organiser le retrait des troupes françaises.
Une réorientation de la stratégie doit être adoptée pour donner la priorité à un processus politique de résolution de cette crise. Ceci doit se faire dans le cadre de l’ONU. Le départ de l’armée française doit s’accompagner d’un renforcement du soutien à l’armée afghane et au peuple afghan ainsi que d’un appui aux forces démocratiques et progressistes nationales. La sortie de crise n’est pas de nature militaire, elle doit être axée en priorité sur le développement du pays et la coopération. Le combat contre le terrorisme passe avant tout par un combat contre ce qui le nourrit, à savoir, la misère des peuples et leur humiliation par des comportements dominateurs.
Nous regrettons que sur un problème aussi grave, le Président de la République se révèle plus attentif à la volonté américaine qu’à la volonté nationale.
Plus que jamais, la Raison commande une réponse politique, seule voie possible pour sortir du bourbier afghan.