La Martinique connaît, depuis plusieurs années, une situation économique et sociale difficile qui ne cesse de se dégrader.
Cette situation se caractérise notamment par un taux de chômage (surtout des jeunes et des femmes) qui se maintient, depuis trop longtemps, à un niveau insupportable et qui augmente de nouveau avec la crise, avec le développement préoccupant de phénomènes de pauvreté, d’inégalité, d’exclusion et d’atteintes à l’environnement ainsi qu’un coût de la vie particulièrement élevé.
Notre pays est confronté à une situation de mal développement chronique à laquelle ni les efforts déployés par les élus ni le réel dynamisme de nos acteurs économiques n’ont pu jusqu’ici apporter de réponses satisfaisantes. Différents plans de développement mis en œuvre – pour la plupart conçus depuis Paris - n’ont pas davantage atteint les objectifs qui leur étaient assignés.
Le système actuel, qui a certes permis en son temps des progrès incontestables, a donc incontestablement atteint aujourd’hui ses limites.
Le mouvement social sans précédent qui a marqué le début de cette année a donné la mesure de la révolte populaire et du mal-être qu’une telle situation peut générer.
Nos compatriotes nourrissent une profonde aspiration au changement. Ils sont de plus en plus conscients qu’aux handicaps structurels généralement reconnus comme freins au développement de la Martinique, s’en ajoute un autre qu’il est désormais difficile de passer sous silence : le handicap institutionnel.
De fait, l’invraisemblable système de région monodépartementale que nous connaissons, aggravé par l’acte II de la décentralisation, se caractérise par un morcellement des centres de décision qui génère un manque de cohérence dans l’élaboration et la conduite des politiques publiques, un manque de lisibilité de celles-ci pour le citoyen, un gaspillage d’énergies, un affaiblissement de la représentation politique martiniquaise face à l’Etat, face à l’Europe et aux pays de la Caraïbe.
Ce système se caractérise, de plus, par une logique - inhérente à la finalité même de l’article 73 de la Constitution - qui conduit l’Etat à privilégier l’application du droit commun dans toute une série de domaines où l’adaptation des textes à nos réalités s’avère pourtant indispensable.
Comment s’étonner alors que la question institutionnelle, qui constitue l’un des enjeux majeurs du débat politique martiniquais, depuis la fin des années 50 – c’est-à-dire plus d’un demi-siècle ! -, soit aujourd’hui de nouveau posée avec une acuité particulière ?
Les élus martiniquais, qui font au quotidien l’expérience des carences du système actuel, ont, une fois de plus, pris leurs responsabilités.
Ils ont d’abord, en décembre 2007, élaboré des orientations stratégiques et novatrices pour le développement de la Martinique. Issues d’une synthèse du Schéma Martiniquais de Développement Economique (S.M.D.E) et de l’Agenda 21, ces orientations constituent les bases solides d’un projet de développement martiniquais.
Ils se sont ensuite saisis, comme en 2001, en 2002 et 2003, de l’instrument dont ils disposent depuis la Loi d’orientation pour l’Outre mer (le Congrès des élus départementaux et régionaux) pour formuler, en toute transparence, des propositions d’évolution institutionnelle à soumettre à l’approbation des Martiniquaises et des Martiniquais.
Au terme des réunions du 18 décembre 2008 et du 18 juin 2009, ils ont, par delà les clivages traditionnels, très majoritairement proposé que la Martinique évolue vers un nouveau cadre institutionnel régi par l’article 74 de la Constitution. Un article qui prévoit de « tenir compte des intérêts propres des collectivités concernées au sein de la République ». Un article qui permet l’accès à l’autonomie.
Les élus ont ainsi exprimé la conviction que l’on ne peut continuer à dénoncer la gravité de la situation et repousser indéfiniment toute idée de mise en œuvre d’une véritable réforme conçue dans l’intérêt bien compris de la Martinique et des Martiniquais : une réforme qui soit réellement à la hauteur des enjeux.
Ils ont marqué une étape déterminante d’un processus démocratique qui appelle la poursuite d’un grand débat au sein de la société martiniquaise ; les Martiniquais devant pouvoir se prononcer, en toute connaissance de cause, à la faveur d’une consultation que le Président de la République, lors de sa dernière visite en Martinique, s’est déclaré prêt à organiser.
C’est pourquoi nous, Responsables et Militants de Partis Politiques, Elus (Conseillers généraux, Conseillers régionaux, Maires), Membres de Regroupements Citoyens, avons décidé, par delà nos enracinements idéologiques respectifs, de nous regrouper au sein d’un pôle de rassemblement intitulé « Rassemblement Martiniquais pour le Changement ».
Nous pensons que l’heure est au rassemblement le plus large autour de la défense des intérêts supérieurs de la Martinique. Qu’il est urgent de faire triompher le sens de l’intérêt général martiniquais sur les logiques partisanes, les stratégies de division et les calculs politiciens.
Nous sommes donc déterminés à participer activement à la mise en œuvre d’un débat responsable et de qualité ; un débat qui doit pouvoir se dérouler sur une durée suffisante, ce qui nécessite, conformément à la demande formulée par le Congrès, de reporter les élections régionales prévues en 2010.
Nous faisons le pari de l’information et de la pédagogie : nous croyons à la maturité démocratique de notre peuple, à sa capacité à résister aux entreprises de désinformation voire de manipulation irresponsable du virus de la peur.
Nos compatriotes ont, par exemple, bien compris qu’en faisant le choix de l’article 74, la Martinique gardera le bénéfice des conquêtes sociales de nos aînés ; qu’elle conservera son statut de Région ultrapériphérique au sein de l’Union européenne (comme l’a d’ailleurs souligné le Président de la République dans son discours prononcé à l’Aéroport Aimé Césaire Martinique, le 26 juin dernier) ; qu’elle se verra toujours appliquer les dispositions de la Constitution qui prévoient que tout transfert de compétences est accompagné du transfert de ressources correspondantes.
Nous sommes donc décidés à faire partager très largement notre conviction que la réforme proposée par le Congrès est en mesure de créer les conditions institutionnelles d’un meilleur développement de la Martinique :
➢ en préconisant, bien sûr, une simplification administrative (une collectivité unique gérée par une assemblée unique) qui garantirait une plus grande efficacité des politiques publiques et une gestion plus pertinente de l’argent public ;
➢ en prévoyant, de plus, que la collectivité envisagée dispose de compétences supplémentaires et surtout d’un pouvoir réglementaire de mise en œuvre de l’ensemble de ses compétences ainsi que d’un réel pouvoir réglementaire d’adaptation des lois et règlements, pour favoriser, dans les domaines où cela s’avère nécessaire (économie, vie chère, transport, logement, foncier, emploi, éducation, culture, sport, etc.), la définition de politiques qui prennent vraiment en compte les réalités de la Martinique, les besoins, les aspirations et l’identité du peuple martiniquais.
Le projet adopté par le Congrès prévoit d’ailleurs d’utiliser les possibilités offertes par l’article 74 de prendre des mesures « justifiées par les nécessités locales » en matière de protection du patrimoine foncier et d’accès à l’emploi. Il importe, dans ce dernier domaine, de convaincre les autorités européennes du bien-fondé, pour le développement d’un pays comme le nôtre, de la mise en œuvre de dispositions dérogatoires au droit commun de l’Union européenne.
Nous exprimons donc notre attachement à ce que les propositions formulées par les représentants légitimes du peuple martiniquais soient soumises à l’approbation de celui-ci.
Nous soulignons que l’un des enjeux fondamentaux de la mise en œuvre d’un changement institutionnel pour la Martinique est aussi d’éviter, au moment où une réforme des collectivités territoriales est envisagée à l’échelle de la France, de nous voir imposer des dispositions qui viendraient aggraver le véritable imbroglio institutionnel actuel.
L’ambition essentielle, autour de laquelle une majorité de Martiniquaises et de Martiniquais peuvent se retrouver, à travers la réforme proposée par le Congrès, c’est de satisfaire à trois impératifs majeurs :
- renforcer la capacité d’initiative martiniquaise ;
- favoriser un meilleur développement durable de la Martinique ;
- répondre pleinement aux exigences de la démocratie par l’instauration de vrais mécanismes de contre pouvoirs, singulièrement l’instauration d’un Conseil exécutif séparé de l’assemblée et qui, en cas de désaccord sur la politique menée, pourra être renversé par le vote d’une motion de défiance constructive.
Le cadre institutionnel proposé, qui s’inscrit dans les ensembles français et européen, est également appelé à favoriser une meilleure insertion de notre pays dans son environnement caribéen et américain.
Nous sommes convaincus que la Martinique se trouve à un tournant de son évolution historique. Que chacune et chacun est donc véritablement appelé, à cet égard, à prendre, en conscience, en dignité, toutes ses responsabilités.
Nous appelons donc solennellement toutes celles et tous ceux qui, comme nous, sont convaincus de la nécessité pour le peuple martiniquais de ne pas rater ce nouveau rendez-vous avec son histoire à nous rejoindre au sein du Rassemblement Martiniquais pour le Changement.
Avec l’assurance qu’une Martinique autonome est possible! Que la construction d’un meilleur avenir pour notre jeunesse dépend avant tout de la mobilisation et du plus large rassemblement des Martiniquais !
An lot balan pou Matinik vansé !
ACCORD POLITIQUE POUR UNE
MARTINIQUE RESPONSABLE DANS LE CADRE DE L’ARTICLE 74
Bâtir le Pays Martinique Pierre SAMOT
Vivre à Schoelcher Maurice JOSEPH-MONROSE
pour Luc Louison CLEMENTE
Mouvement Indépendantiste Martiniquais Alfred MARIE-JEANNE
Rassemblement Démocratique pour la Martinique Claude LISE
Parti Communiste Martiniquais Georges ERICHOT
MODEMAS Garcin MALSA
PALIMA Francis CAROLE
CNCP Robert SAE
OSONS OSER Pierre PETIT
OBJECTIF 74 Louis BOUTRIN
Mouvement Démocratique Josephin Simon MORIN
Mouvement Populaire Pilotin Auguste ARMET
Nestor Bruno AZEROT
Christiane BAURAS
Gilbert EUSTACHE
Claudine JEAN-THEODORE
Justin PAMPHILE
Fait à Fort de France, le mercredi 29 juillet 2009