Hollande/PS-EELV : 5 années de trahisons (2012-2017)
Vendredi 27 Février 2015
Parmi les 500 000 chômeurs lésés par les droits rechargeables estimés par l’Unedic, beaucoup de précaires, de cadres, d’intermittents, de seniors, mais aussi de jeunes… Tous les âges et catégories socioprofessionnelles sont concernés par ce fléau. Témoignages
« Un encouragement à poursuivre. » À peine les chiffres du chômage publiés hier par le ministère du Travail, Manuel Valls s'est réjoui de la très légère baisse du nombre de demandeurs d'emploi. En catégorie A, les chômeurs n'ayant pas du tout travaillé, sont 19 100 de moins sur le mois de janvier, en baisse de 0,5 %.
Mais si on y ajoute les catégories B et C, les demandeurs d'emploi exerçant une activité réduite, le chômage reste en hausse de 0,3 %, soit 16 100 personnes en plus. Sur l'année, en catégories A, B et C, l'augmentation est même de 6,2 %. Au total, plus de 5,2 millions de personnes restent inscrites sur les listes de Pôle emploi. Et les droits rechargeables pourraient bien contribuer à maintenir nombre de chômeurs dans cette situation. Présentés comme une avancée dans la dernière convention d'assurance chômage, signée par la CFDT, FO et la CFTC, ils n'ont cessé depuis leur mise en place, le 1er octobre dernier, de montrer leurs effets pervers. Avant, la procédure de « réadmission » était en vigueur : un capital de droits était calculé en fonction de la période d'indemnisation la plus favorable. Désormais, avec les droits rechargeables, si une personne a accumulé deux périodes de droits au chômage, elles se succèdent l'une à l'autre. Si cette première période d'indemnisation est inférieure à la seconde, le chômeur ne s'y retrouve pas et glisse encore plus dans la précarité. D'après un chiffrage de l'Unedic de juin 2014, 500 000 chômeurs seraient victimes d'une baisse d'indemnisation à cause des droits rechargeables. La CGT chômeurs rebelles du Morbihan, en pointe sur les conséquences désastreuses des droits rechar-geables, a reçu des centaines de témoignages de personnes piégées. Comme l'explique Vladimir Bizet-Stefani, « les demandeurs d'emploi sont contraints de rester chez eux, d'accepter des boulots mal payés ou de travailler au noir, des solutions totalement absurdes ! » Sans possibilité de se délester de leurs droits antérieurs, les chômeurs n'ont d'autre choix que de les écluser en restant inscrits sur les listes de Pôle emploi. Ou de reprendre n'importe quel boulot pour vivre décemment. Mais, dans ce cas, il s'agit de reculer pour mieux sauter, ils conservent toujours ce reliquat d'allocations tenace. Acculées, les victimes ont contacté en masse les pouvoirs publics et les associations. Face à l'ampleur du scandale humain et médiatique, le gouvernement a été contraint de réagir. Syndicats et patronat se réuniront le 3 mars. Une journée de mobilisation est également organisée le même jour. 1. Enora, 24 ans, Punie pour avoir travaillé pendant ses études Diplômée d’arts du spectacle, la route d’Enora semblait toute tracée : elle sera créatrice de bijoux. Avant de se lancer, elle signe deux CDD chez Zara. Quand la Rennaise s’inscrit à Pôle emploi, en octobre 2014, l’atterrissage est brutal. Non seulement son dossier met 57 jours à être traité, mais l’ex-ANPE lui déniche un reliquat de droits rechargeables issus d’un petit boulot étudiant de 2013. Pendant sa licence, la Rennaise gardait les collections du musée des Beaux-Arts deux à six jours par mois afin de mettre du beurre dans les épinards. À cause de cet emploi, elle perçoit 310 euros mensuels pendant 610 jours. Alors qu’avec son dernier emploi de vendeuse, elle aurait pu prétendre à 700 euros… Un coup de massue. « Je m’en sors moins bien que quand j’étais étudiante précaire ! C’est une punition pour tous les gens obligés de travailler pendant leurs études parce qu’ils n’ont pas papa et maman derrière et ça, ça passe très mal ! » La voix chargée de tristesse, elle explique que cette situation l’a plongée « dans une profonde remise en question ». La jeune femme vient d’entamer trois mois de bilan de compétence. Une bouée de sauvetage pour le moral et une façon d’écluser une partie de son reliquat de droits riquiqui. En formation, son allocation a été doublée, atteignant 600 euros, le minimum légal. Une fois la formation terminée, elle retombera à 300 euros. Exit ses projets de création de bijoux, sa préoccupation est désormais de faire bouillir la marmite. « Cet été, je vais travailler à l’usine sinon je ne m’en sortirai pas. On mange des pâtes, je ramasse les fruits et légumes à la fin du marché. Mon ami est aussi au chômage, je ne peux même pas m’acheter des vêtements pour aller aux entretiens, heureusement que je sais coudre ! » Pour relâcher la pression, elle voit ses amis et écrit de la poésie. « Ce sont les seules choses qui me vident la tête. » Enora a l’impression de dériver dans une mer de problèmes, sans personne pour la secourir. « J’ai choisi un cursus universitaire qui me plaisait, de suivre un parcours artistique. Je n’ai rien contre faire des jobs alimentaires sauf qu’il n’y a pas de boulot, on ne m’a jamais proposé de CDI ! Je suis désenchantée sur le monde du travail. » La jeune femme ne croit plus les promesses du gouvernement sur l’emploi des jeunes. « Nous ne sommes pas leur priorité. Je me sens abandonnée par le gouvernement et par mon pays. Il ne nous propose aucune solution pérenne. Jeune chômeuse, j’ai moins de droits que les autres. Je ne peux même pas toucher le revenu de solidarité active (RSA), car je n’ai pas vingt-cinq ans ! » 2. Léo, 48 ans, La double peine pour un cadre supérieur « Le deuxième effet Kiss Cool. » Léo se serait bien passé d’écoper de deux effets pervers de la dernière convention d’assurance chômage. Son ton blagueur ne laisse pas présager la gravité de sa situation. « Je suis en faillite personnelle, lâche-t-il. Sans emploi depuis juillet 2014, je ne toucherai rien de Pôle emploi avant le mois de mars. J’ai été obligé de vendre une partie de mes affaires. Je ne peux pas m’en sortir avec 850 euros de loyer à payer, 200 euros de pension alimentaire. Je vais devoir quitter mon appartement et remonter habiter chez ma mère dans le nord, sinon je suis SDF. » Cadre supérieur d’un géant des télécommunications, licencié « pour ne pas avoir généré assez de rentabilité », précise-t-il, un premier délai de carence lui est infligé jusque octobre 2014. À son inscription à Pôle emploi, il rencontre un premier problème. Au lieu des 2 000 euros mensuels d’allocations dues pour son dernier travail, il se retrouve avec 840 euros (28 euros par jour) pendant 140 jours. Progressivement, Léo tire le fil. Trois ans plus tôt, il avait quitté un poste de chef de secteur et avait ouvert ses droits au chômage, soit les fameux 28 euros journaliers. Le quadragénaire tombe de l’armoire. Et ce n’est pas fini. Deuxième retour de bâton, il apprend qu’un nouveau délai de carence lui est imposé. Léo ne pourra bénéficier de son allocation famélique avant fin mars, le laissant plus de neuf mois sans aucun revenu ! Pour calculer ce délai d’indemnisation, depuis la dernière convention d’assurance chômage, Pôle emploi se base sur l’allocation journalière, ici 28 euros par jour, et les congés payés non pris lors de son dernier emploi dans les télécoms. « J’appelle ma conseillère, je lui explique que je n’ai pas eu de parachute doré. Je me suis fait totalement avoir. » Honteux de cette situation, Léo n’en a parlé à personne. « Mon fils devait venir me voir dans le sud pour les vacances, comme je n’ai pas les moyens, j’ai menti, j’ai dit “papa a un séminaire”, ça me brise le cœur. Je viens d’une famille italienne où le travail est particulièrement important. » Pour sortir la tête de l’eau, ce cadre se jette sur les offres d’emploi, quitte à se brader. Pas question de rester les bras croisés à attendre que ces droits très bas s’écoulent lentement. « Mais le marché du travail est pourri, surtout quand on a quarante-huit ans et mon niveau expérience. Ces 28 euros par jour pendant 140 jours, Pôle emploi n’a qu’à les garder ou les donner à la Fondation Abbé-Pierre, je n’en veux pas, retirez-moi ce truc ! » 3. Martin, 28 ans, Intermittent bloqué au régime général Le traquenard des droits rechargeables, Martin l’avait senti venir. En s’inscrivant à Pôle emploi, il se doutait qu’il ne pourrait pas entrer dans l’annexe 10 relative aux techniciens du spectacle. « J’avais pourtant réalisé mes 507 heures en dix mois, de mai à novembre 2014, des CDD d’usage de régisseur comme prévu pour dépendre du régime des intermittents. » Juste avant, pendant deux ans, il avait exercé la fonction de coordinateur en contrat aidé dans une structure culturelle, une compagnie artistique des arts de rue. Cette période de travail, indemnisée par le régime général de l’assurance chômage, est prise en compte en premier par Pôle emploi. Résultat, il ne peut pas accéder au régime des intermittents du spectacle. Et au lieu des 1 500 euros d’allocation auxquels il aurait pu prétendre, il ne se retrouve qu’avec 950 euros mensuels pendant 660 jours. « Un truc de malade ! » s’exclame le jeune père de famille. Pris dans cette spirale infernale, Martin a deux issues possibles. Soit, il reste chez lui en attendant que ses 660 jours de droits très bas soient éclusés. Au risque de perdre tous ses contacts dans le milieu artistique en début de carrière. Impossible à envisager. Soit, il continue à travailler et essaie de liquider une partie de ses allocations en même temps. « Je suis obligé de magouiller, j’accepte des missions. Par exemple, pendant un mois, je vais travailler mais je ne serai déclaré que celui d’après, ce qui me permet d’écouler un peu d’indemnisation chômage. C’est possible de faire ça dans les petites structures, pas dans les grandes. Tout ça me fait rater un paquet de cachets. En faisant des comptes d’apothicaires, j’ai calculé que je mettrai quatre ans à épuiser mes droits. » Pas du genre à se laisser faire, Martin a contacté le défenseur des droits, son député, les associations de chômeurs. Pour le technicien, les droits rechargeables sont aussi une manière de remettre en cause les annexes 8 et 10 : « L’intermittence définit un nouveau modèle de société, basé sur les solidarités, ça ne plaît pas à tout le monde ! J’aime cette grande indépendance : avoir plusieurs employeurs, de multiples projets… » Pour lui, la perspective d’une nouvelle négociation le 3 mars sur les droits rechargeables ne règle pas tout. « Le gouvernement se lave les mains de ce qui se passe en ce moment ! » 4. Gérard, 52 ans, Chômeur privé de tout revenu Technicien de maintenance dans l’industrie pendant trente ans, Gérard a enchaîné les emplois précaires depuis les années 2000. Musicien harmoniste, chanteur, intervenant dans des classes-relais auprès d’enfants en grande difficulté, il vit pour son art et de petits boulots. Il y a deux ans, le Bourguignon dégote un emploi de pion dans un collège, des remplacements de congés maternité, avant d’embrayer sur des vacations dans des écoles avec la réforme des rythmes de vie scolaire deux heures par semaine. Il touche 800 euros de chômage, correspondant à ses remplacements jusqu’à fin novembre. D’un coup, c’est la dégringolade. Des droits rechargeables se déclenchent à cause de ses vacations à l’école à hauteur de 1,09 euro par jour jusqu’à mars. Depuis janvier, Gérard vit avec 30 euros par mois ! « Je me retrouve piégé dans ce machin-là, c’est une méthode pour réduire les gens en esclavage », grommelle-t-il. Tout de suite, il dépose un dossier de RSA. Refusé, au motif que le calcul s’effectue sur les trois mois précédents, période où il touchait encore 800 euros d’allocation. Gérard se retrouve le bec dans l’eau. « J’ai déposé un recours devant le conseil général pour le RSA, j’ai contacté une assistante sociale qui était scandalisée, mon seul recours est de porter l’affaire devant le tribunal administratif, donc je vais attendre. » À cinquante-deux ans, Gérard a beau se démener pour trouver un emploi, rien ne vient. « J’ai galéré par le passé, je suis du genre pugnace, mais là, je vis chez mon père de quatre-vingt-neuf ans, militant communiste et CGT, qui comprend la situation. Ce n’est pas amusant », raconte-t-il, amer. Gérard tient à ses trois luxes : son abonnement de téléphone portable, sa carte de train pour aller visiter son amie et ses cigarettes. « Ce dispositif est censé nous faire accepter n’importe quel travail, mais il nous met juste dans une situation de survie. » Le scandale des « recalculés ». Avant les baisses d’indemnisation engendrées par les droits rechargeables, les demandeurs d’emploi avaient déjà dû subir en 2003 une rigidification des règles d’assurance chômage qui avait entraîné l’exclusion de l’indemnisation de 300 000 d’entre eux. Le Conseil d’État avait annulé en 2004 l’agrément donné par l’État à la convention d’assurance chômage. Les demandeurs d’emploi victimes avaient pu être réintégrés. Les droits rechargeables seront-ils un nouvel épisode des « recalculés » ? http://www.humanite.fr/le-drame-social-des-droits-rechargeables-566812 |
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