Actualités et informationsRenflouer les banques, réduire les salaires et allocations de 22 %, liquider les accords sectoriels, licencier 15 000 fonctionnaires. Telles sont les injonctions imposées au gouvernement grec. La fin du tunnel pour les Grecs ? Même pas. Ce quatrième plan d’austérité devrait être suivi par un cinquième en juin. La riposte des travailleurs est immédiate : 48 heures de grève
La « troïka », le trio infernal Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international, a imposé son ultimatum à la Grèce. Après avoir délibéré pendant 2 jours, les trois partis de la coalition au pouvoir, le PASOK (social-démocrate), la Nouvelle Démocratie (conservateurs) et le LAOS (extrême-droite) ont plié au chantage.
Parmi les priorités figurent la recapitalisation des banques grecques, importants détenteurs d’obligations d’État. Les partis du « front noir » (les trois partis au pouvoir) ont vite été d’accord à ce sujet. Ce qui a entraîné une hausse de 7 % des actions des banques grecques à la clôture de la Bourse d’Athènes le 6 février. Dans sa joie, Emporiki Bank, filiale grecque du Crédit agricole, a annoncé le jour même une réduction de 11,7 % des salaires de ses employés. Deux jours plus tard, le couperet est tombé. Ce quatrième train de mesures impose une réduction générale et immédiate des salaires de 22 % et de 32 % pour les jeunes, une réduction des allocations de chômage, une réduction de 15 % des pensions complémentaires, la liquidation de tous les accords sectoriels, le licenciement de 15 000 salariés du secteur public et une réduction des dépenses de santé publique. Explosion du chômage et salaires de misère Ces mesures vont plonger davantage la Grèce dans la récession et la misère. Le taux de chômage en Grèce a dépassé les 20 % et le million de personnes depuis novembre dernier. Il est passé de 13,9 % à 20,9 % entre novembre 2010 et novembre 2011. Il touche presque un jeune sur deux de moins de 25 ans (48 %). Les rémunérations des fonctionnaires ont plongé (de 1 300 euros en moyenne en 2009 à 850 euros aujourd’hui), tandis que la TVA s’envole à un niveau jamais atteint (23 %). C’est aujourd’hui au tour de l’ensemble des travailleurs. La réduction des salaires en 2012 par rapport à 2009 dépasse les 45 %. Mais en dimension réelle, en tenant compte de l’inflation, cette réduction est évaluée à 55 %. Cette diminution du volume des salaires va vider davantage les caisses des pensions. Et réduire d’autant la consommation des ménages, ce qui entraînera de nouvelles fermetures massives d’entreprises. C’est la spirale infernale de la récession. Le retour de la malnutrition Devant le parlement grec, des agriculteurs distribuent des pommes de terre et des oignons. Les gens se bousculent. « On n’avait pas vu ça depuis l’Occupation », peste Andreas qui se confie au quotidien français Libération. Dans les grandes villes, des distributions de nourriture et des soupes populaires rassemblent des milliers de personnes. Cela rappelle les années de famine de l’occupation nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les écoles primaires, les associations de parents dénoncent de nombreux cas de sous-alimentation d’enfants. Face à la colère populaire, le ministère de l’Enseignement a été obligé d’annoncer la distribution de collations dans 18 écoles des quartiers populaires d’Athènes. A Thessalonique, au moins 600 élèves souffrent de sous-alimentation, a du reconnaître la municipalité. Le docteur Nikita Kanakis de Médecins du monde parle de ces enfants qui viennent se faire soigner le ventre vide. La consultation gratuite était ouverte au départ pour les immigrés clandestins sans ressources. « Depuis un an, ce sont les Grecs qui viennent nous voir. Des gens de la classe moyenne qui, en perdant leurs droits sociaux, n’ont plus droit à l’hôpital public. Et depuis six mois, nous distribuons aussi de la nourriture comme dans les pays du tiers-monde. Jusqu’où peuvent aller les exigences de Bruxelles, quand des enfants qui ne vivent qu’à trois heures d’avion de Paris ou Berlin ne peuvent plus de soigner ou se nourrir ? » Augmentation de 25 % des SDF Selon les estimations officielles, en deux ans, le nombre de sans-domicile-fixe a augmenté de 25 %. Dans les grandes villes, la situation est dramatique. A Athènes, des familles avec des enfants dorment sous tentes ou dans des cartons y compris dans les quartiers historiques au pied de l’Acropole. Dans un quartier du Pirée, 1 500 soupes populaires sont servies deux fois par jour à des gens dans le besoin, des Grecs en majorité. De nombreuses familles ne parviennent plus non plus à rembourser leur crédit au logement. Près de 50 000 habitations sont sous la menace d’une saisie immobilière. Si ces ventes forcées n’avaient pas été « gelées » légalement depuis deux ans, des dizaines de milliers de gens seraient jetés à la rue. Le laboratoire de l’Europe Est-ce le dernier plan, la fin du tunnel ? Non. Le porte-parole du PASOK, Panos Beglitis l’a annoncé sur la chaîne Skaï : « Ce ne sont pas les dernières mesures, de nouvelles viendront en juin. Il faut dire la vérité aux gens, notamment sur les salaires. » Le gouvernement prépare notamment des réductions de 20 % dans les salaires des fonctionnaires aux traitements majorés (militaires, pompiers, professeurs, magistrats…), la réduction des subsides aux communes et régions. « L’argent qu’on nous promet ? Ce sont des prêts qui ne servent qu’à rembourser nos créanciers », estiment de nombreux Grecs. Ainsi s’exprime Andreas à Libération : « Nous vivons sous une dictature économique. Et la Grèce est le laboratoire où l’on teste la résistance des peuples. Après nous, ce sera le tour des autres pays d’Europe.» La responsabilité du peuple A l’appel du PAME, le Front militant des travailleurs animé par le Parti communiste de Grèce (KKE), les deux grandes centrales syndicales du privé et du public ont annoncé 48 h de grève dès le vendredi 10 février. La veille, le PAME a organisé des grands rassemblements dans 70 villes de tout le pays. Et le 7 février, le pays était déjà en grève générale, toujours à l’initiative du PAME. Dans tous les coins du pays, la résistance s’organise, dans les usines, les lieux de travail, les quartiers. « Désormais, la suite du mouvement est de la seule responsabilité du peuple, explique Aleka Papariga, secrétaire générale du KKE. Soit le peuple balaiera complètement ce gouvernement, soit il gaspillera ses pleurs et son indignation face à ces anciens et nouveaux pseudo-sauveurs. » Salaires taillés à la hache Kostas a 28 ans et est célibataire. Il travaille comme ouvrier dans une petite entreprise depuis trois ans. Au début, son salaire net dépassait de peu les 1 000 euros. Il touche à peine 750 euros aujourd’hui. Demain, son patron ne le paiera plus que 585 euros. Eleni a 23 ans. Elle travaille comme caissière dans une grande surface depuis moins d’un an. Elle est payée au salaire minimum des moins de 25 ans : 570 euros net. Demain, Eleni devra survivre avec 430 euros par mois. Dimitri a 3 enfants. Son épouse a perdu son travail et est à sa charge. Il travaille comme employé dans une banque depuis quelques années. Son salaire était de 1 150 euros avant la crise. Aujourd’hui, il touche 900 euros net. Demain, il devra nourrir toute sa famille avec 700 euros. Giannis est ouvrier municipal. Depuis 2 mois, il ne touche plus son salaire, car les caisses de la commune sont vides. Avec ses collègues, il participe à toutes les manifestations. Thanos a 50 ans. Après avoir travaillé pendant 25 ans comme ouvrier, il a perdu son emploi. Il perçoit une allocation de chômage de 480 euros. Demain, son allocation sera réduite à 375 euros. Kostas, Eleni et tous les travailleurs de Grèce ont perdu 45 % de leur salaire en 3 ans. Sources : Agence athénienne de presse (31 janvier, 1er et 9 février 2012), Rizospastis, 7 et 8 février 2012, Libération, 30 janvier 2012. http://www.ptb.be/weekblad/artikel/greve-generale-en-grece-troisieme-train-de-lausterite-direction-pauvrete.html |
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