C'est le Président du Venezuela qui résume assez bien la situation. Lors d'une interview sur une chaîne espagnole La Sexta, Nicolas Maduro déclare que le mouvement indépendantiste en Catalogne est une force sociale qui rejette "le néolibéralisme et le pillage de l'Espagne". Et l'analyse qu'il porte sur la Catalogne est juste et le mouvement indépendantiste a connu un basculement, du fait d'une lutte des classes forte, un glissement vers la gauche, au point que le vote ouvrier indépendantiste des "Rufians" (en référence au député ERC Gabriel Rufian, un trentenaire issue du milieu ouvrier hispanophone de la banlieue rouge de Barcelone) a connu une très forte croissance .

La Catalogne n'est pas qu'une grande station balnéaire sur la Méditerranée. C'est aussi une place forte industrielle et maritime.

Elle tire sa richesse du travail d'une importante classe ouvrière notamment dans l'industrie automobile (Séat), portuaire (port de Barcelone et de Tarragone), des transports (notamment routier), de l’industrie chimique, de l'agroalimentaire, des nouvelles technologies, des centres d'affaires et du tourisme de masse.

2017, année record pour les luttes ouvrières

La Catalogne (selon les données officielles de l'IDESCAT) compte 2.382.000 travailleurs dans le secteur privé et 397.000 pour le secteur public (dont 200.922 rattachés à la Generalitat). On constate que le secteur public est très faible et se concentre sur les fonctions régaliennes de l'état (Police, Pompiers, écoles, administration). Ainsi les grèves se concentrent essentiellement dans les entreprises privées et non dans les administrations publiques.

En octobre 2017, la Catalogne a comptabilisé 9.023.624 heures de grève contre 84.264 heures en 2016.

A titre de comparaison, la grande grève générale du 14 novembre 2012 (contre les politiques d'austérité de Mariano Rajoy), dans toute l’Espagne, avait totalisé 11.599.492 heures de grève. La grande grève générale en Catalogne du 3 octobre 2017 atteint à elle seule 78% des heures de grèves du 14 novembre 2012.

De même, le total des heures de grève en octobre 2017 en Catalogne approche celui de toute l'Espagne pour l’année 2016 : 11.409.992 heures.

La Catalogne a ainsi connu la plus grande grève générale de ces 25 dernières années. A l’exception de quelques PME et quelques supermarchés, la quasi totalité de la classe ouvrière a cessé le travail.

Fin 2017, il y a 418.018 chômeurs inscrits (soit entre 13 et 14% de la population active).

Quelques conflits victorieux :

Grève d'une semaine à la Cité de la justice pour mettre fin a un contrat de sous-traitance et obtenir le paiement d'arriérés de salaires.

Grève dans les hôpitaux du groupe Quirón Salud pour améliorer les conditions de travail.

Grève pour renforcer les droits des examinateurs du permis de conduire.

Grève dans les Transportes Batet pour obtenir le paiement d'arriérés de salaires.

Mêm conflit à Saint-Gobain (le principal fournisseur de verre dans le secteur automobile), chez Bergé Logística, chez Logaritme Logística Services ou chez le nettoyage routier de Vilanova i la Geltrú. 

Une grève chez Coca-Cola a permis de gagner 15% d'augmentation de salaire et de meilleures conditions de travail.

Un conflit social a permis la municipalisation du nettoyage dans la ville de Sabadell.

Les indicateurs de grèves et le nombre de grévistes dans l'ensemble de la Catalogne, sans tenir compte des grèves dans le secteur public, connaissent une croissance de 20%. Lorsque l'on ajoute les deux grèves générales (3 octobre et 8 novembre - cette dernière sans le soutien des CCOO et de l'UGT) il y a une croissance à 3 chiffre.

L'état des lieux des organisations syndicales en Catalogne

Comme en France, le syndicalisme est divisé en plusieurs organisations avec deux grandes confédérations majeures, les CCOO et l'UGT.