Europe
29/11/2007 18:31

Vladimir Jirinovski sous influence de Poutine?

MOSCOU - Le parti qui pendant une décennie, sous la houlette de l'imprévisible Vladimir Jirinovski, a souvent diverti et parfois séduit les Russes avec son virulent nationalisme anti-occidental n'est pas en bonne posture à l'approche des élections législatives.


Selon des analystes, le président Vladimir Poutine aurait précipité ce déclin en phagocytant son fonds de commerce.

Le dernier sondage publié cette semaine crédite le Parti démocrate-libéral de Russie (LDPR) de Jirinovski de 7% d'intentions de vote, soit juste assez pour être représenté à la Douma d'Etat.

Apparemment, la récupération d'Andreï Lougovoï, qui est l'un de ses candidats, n'a pas suffi à doper sa cote de popularité. Lougovoï est devenu un héros aux yeux des nationalistes quand la Grande-Bretagne a annoncé son intention de le juger pour le meurtre d'Alexandre Litvinenko, ancien agent du KGB vivant à Londres et détracteur du Kremlin.

Le principal problème du LDPR, c'est que les électeurs n'ont plus besoin de sa rhétorique enflammée pour la satisfaction de leurs aspirations nationalistes, auxquelles Poutine a su lui-même répondre.

GROSSIÈRETÉ

"Je décrirais Poutine comme une version sérieuse (...) de Jirinovski", explique Leonid Sedov, chercheur au sein de l'institut de sondage Levada. "Il a beaucoup emprunté à Jirinovski dans sa manière de procéder. Il a également emprunté à Jirinovski sa rhétorique anti-occidentale, sans parler de certaines expressions plutôt relevées. Et cette grossièreté (...), ce comportement légèrement malicieux, plaît aussi à certains électeurs."

Poutine est candidat aux élections législatives en tête de la liste de Russie unie, parti pro-Kremlin qui, d'après les sondages, devrait remporter au moins 60% des suffrages, loin devant ses principaux concurrents.

Poutine a récemment accusé des gouvernements étrangers de soutenir ses adversaires pour affaiblir la Russie et lui "jouer des mauvais tours". Il a dit aussi que des militants de l'opposition "visitaient furtivement" les ambassades étrangères en quête d'un soutien financier.

Lundi, Poutine a accusé Washington de vouloir discréditer les élections et estimé que la Russie devait se défendre pour en décourager d'autres de "mettre leur nez morveux" dans ses affaires.

Ce langage imagé n'est pas inédit pour un responsable politique en Russie: c'est Jirinovski qui en a le premier fait usage, bien avant que ce "parler vrai" ne pénètre les ors du Kremlin.

Dans les années 1990, il disait attendre avec impatience le jour où des soldats russes "nettoieraient leurs bottes" dans l'océan Indien. Il a estimé que les Etats-Unis devaient céder l'Alaska à la Russie et a qualifié de "bandit" la reine Elizabeth d'Angleterre.

Un débat télévisé avec un adversaire politique a tourné court quand Jirinovski lui a jeté un verre de jus de fruit et il a également été impliqué dans une altercation à la Douma.

CONFORMISME

Dans les années 1990, il fut brièvement considéré comme l'un des candidats les mieux placés pour la présidentielle. Son parti est actuellement le quatrième en nombre de sièges au parlement, avec 36 députés sur 450.

Jirinovski dit s'opposer au Kremlin et courtiser des électeurs dont les vies ne se sont pas améliorées depuis 2000, sous les deux mandats de Poutine.

Mais son LDPR a voté avec les partis pro-Kremlin des lois importantes. Ses détracteurs affirment que son hostilité affichée envers l'establishment n'est qu'une façade et qu'il est en fait assujetti au Kremlin. Jirinovski dément tout arrangement en coulisses.

"Le LDPR n'est pas dans l'opposition", juge toutefois Sedov. "Les électeurs du LDPR sont assez conformistes, ils acceptent le régime de Poutine (...) parce que Poutine ressemble tellement à Jirinovski."

En campagne la semaine dernière dans le village de Mantourovo, dans la région de Koursk (Ouest), Lougovoï, ancien garde du corps de la police secrète "recruté" par le LDPR qui tablait sur sa popularité, s'efforçait de battre le rappel.

Il a affiché une nouvelle fois son mépris pour les autorités britanniques et s'est présenté aux électeurs comme un père de famille avec quatre enfants qui investit dans des élevages de porcs et de bétail.

Mais l'accueil fut tiède. "J'aime bien Lougovoï, il est très sympathique", explique Nina, une villageoise. "Mais je préférerais voter pour Russie unie."

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