Régions
30/11/2007 15:22

POUVOIR D’ACHAT, LA PRIORITÉ DES FRANÇAIS

La Marseillaise

Six mois après l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, les Français sont toujours aussi inquiets face à la dégradation de leur pouvoir d’achat.



Où en est le pouvoir d’achat des Français ? Quel est le jugement des Français ?

Si Nicolas Sarkozy est venu une fois encore occupé, hier soir,les écrans de télévision, c’est qu’il est conscient que le colère monte contre l’échec de sa politique sur la question du pouvoir d’achat. En six mois, son bilan est proche de zéro.

La faiblesse et surtout l’ambiguïté de l'appareil statistique sur le sujet donne lieu à une vaine polémique: la baisse du pouvoir d’achat est-elle le produit du «ressenti » de la population ou est-elle bien réelle ? Le débat semblera surréaliste à de nombreux salariés qui peinent toujours plus à boucler leurs fins de mois. A temps plein, la moitié d’entre eux touche un salaire net inférieur à 1484 euros mensuels et 90 %moins de 2 959 euros (19 000 francs). En outre, 1,3 million d’actifs disposent de revenus inférieurs au seuil de pauvreté(645 euros par mois). C’est dire qu’ils sont touchés de plein fouet par l’augmentation de toutes les dépenses incompressibles : logements, transports, nourriture, santé… De 2001 à 2006, le carburant a fait un bond de 22%, le fioul domestique de 66%, la visite chez le médecin de 22%.

L’étude publiée hier par l’INSEE ne dément pas cette approche. Elle souligne que les salaires ont crû en moyenne de0,5% par an entre 2000 et 2005 pour les salariés à temps complet du privé, hors inflation, mais le revenu salarial de tous les salariés, dont ceux à temps partiel, a baissé de 0,1% par an. Lors de ces cinq années,les fluctuations conjoncturelles du marché de l'emploi ont joué sur la rémunération des salariés,rappelle l'Institut de statistiques.

Pour comparaison, on rappela que depuis 2000, les dividendes versés aux actionnaires des entreprises du CAQ 40 sont passés de 15,2milliards d’euros à 31,6 milliards d’euros.

Depuis de longs mois, la question du pouvoir d’achat est devenue la principale préoccupation des Français. En se proclamant candidat puis président du pouvoir d’achat, Nicolas Sarkozy a eu l’habileté politique de surfer sur cette priorité.Mais un semestre après son entrée à l’Elysée,son bilan est très sévèrement jugé. Le dernier sondage IPSOS souligne que 44 % des Français s’attendent à une baisse de leur pouvoir d’achat dans les mois qui viennent. En six mois, la proportion de personnes plaçant le niveau de salaire en tête de leurs préoccupations est passée de 46 % à 51 %.

Cette tendance est corroborée par l’étude publiée hier sur la chute du moral des ménages. "Les résultats de l'enquête de conjoncture auprès des ménages font froid dans le dos", résume Alexander Law, économiste en chef au cabinet Xerfi. L'indicateur de l'Insee mesurant le moral des ménages est passé à -28 en novembre, contre-23 le mois précédent, "un chiffre très proche de celui enregistré à la fin 2005 suite aux troubles dans les banlieues", relève Alexander Law.

Tous les soldes d'opinion qui composent cet indice ont reculé,"mais le plus notable est la lourde chute des intentions d'achats (-19), soit le niveau le plus faible depuis septembre 2005",souligne Mathieu Kaiser (BNP-Paribas). "Cela est cohérent avec des anticipations de niveau de vie et de pouvoir d'achat nettement dégradées" de la part des ménages,qui redoutent également une hausse de l'inflation,analyse-t-il.

Selon l'Institut national de la statistique, les perspectives de niveau de vie en France ont chuté de 11 points en un mois, soit un plongeon de 36 points depuis l'élection de Nicolas Sarkozy en mai, rappelle Marc Touati (ACDEFI). Entre la flambée des prix à la pompe et celle des denrées alimentaires, sans oublier les loyers qui progressent toujours à un rythme soutenu (plus de 3%), "les ménages ne peuvent que continuer à avoir le sentiment d'un pouvoir d'achat rogné par les dépenses contraintes", explique Mathieu Kaiser.

Le23 janvier dans une interview au Monde, Nicolas Sarkozy alors candidat UMP, déclarait : « Notre grand problème est celui du pouvoir d'achat. Pourquoi avons-nous, depuis quinze ans,un taux de croissance inférieur de 1 % à celui des meilleurs des pays libres ? Parce que les salaires sont trop bas, les charges trop lourdes, la pression fiscale trop élevée.»

S’il a tenu parole sur l’abaissement des charges des entreprises et de la pression fiscale des plus aisés, il est resté quasi inactif sur le « grand problème » du pouvoir d'achat des salariés.

C'est particulièrement le cas dans les domaines où l’Etatest directement responsable. Ainsi, ni le SMIC, ni les allocations sociales (RMI, allocation handicapé, allocation de rentrée scolaire, etc.) n’ont eu droit à un coup de pouce. Pire, ila cautionné l’instauration des franchises médicales et la suppression de l’exonération de redevance télé pour quelque 700 000 personnes à revenus modestes.

Quant à la défiscalisation des heures supplémentaires,présentée comme la mesure phare, son efficacité est contestée par l’ensemble des syndicats salariés mais aussi par une partie du patronat. Hier, une dépêche AFP expliquait que « les mesures destinées àinciter les entreprises à recourir aux heures supplémentaires,entrées en vigueur il y a deux mois, peinent à séduireles PME rebutées par un dispositif jugé limité et trop complexe à mettre en œuvre ».

Ce rapide bilan serait partiel s’il ne rappelait qu’il est des domaines où Nicolas Sarkozy a su financer des mesures en faveur du pouvoir d’achat... des plus riches. Le paquet fiscal,voté cet été, s’élève à près de 15 milliards d’euros par an, dont 800 millions pour le bouclier fiscal, 2,2 milliards pour les droits de succession, 2milliards pour l’abattement sur le bien nommé Impôt de solidarité sur la fortune.

Nicolas Maury



Lu 1775 fois




Flashback :