Nouvelles de la Faim et de la Mort!
20/04/2006 00:00

Mondialisation & OMC

Faut-il brûler L’OMC ? Débat Lamy Bové Rainelli

Alors que les négociations pataugent à l’Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, son directeur général, José Bové, de la Confédération paysanne, et Michel Rainelli, économiste, débattent de la régulation de la mondialisation.

Pascal Lamy : Cette institution devrait plutôt être considérée par la gauche comme un outil de régulation du capitalisme de marché. A la base de l’OMC, il y a l’idée que l’ouverture des échanges, sur le principe de la réciprocité, de la non-discrimination et de règles acceptées par tous, est globalement bénéfique.



Les pays qui se sont fermés ne connaissent pas le même développement que ceux qui se sont ouverts. L’histoire économique depuis le XIXe siècle est à cet égard riche d’enseignements. Mais l’ouverture n’est pas profitable à toutes conditions, sous toutes les latitudes et toutes les longitudes. Elle n’est pas une condition suffisante du développement.

Faute de réunir un certain nombre d’éléments (qui relèvent non de l’OMC mais des politiques nationales et aussi, pour les pays pauvres, de la solidarité internationale), l’ouverture peut au contraire se traduire par des coûts supérieurs aux bénéfices. D’où l’importance de préserver, et c’est le cas au sein de l’OMC, des espaces d’autonomie permettant aux Etats de mener des politiques propres en fonction de leurs arbitrages sociaux, économiques et environnementaux. Cette idée est au cœur de ce que j’appelle le « consensus de Genève », par opposition au consensus de Washington, selon lequel il suffirait de libéraliser à tout va pour que l’intendance suive.

Pour que les bénéfices globaux de l’ouverture des échanges se traduisent dans la réalité, il faut aussi que les règles du jeu soient les mêmes pour tous et qu’elles aient été décidées par tous. D’où le principe, à l’OMC, de décider par consensus. La possibilité existe donc, pour les pays pauvres, de bloquer des décisions. Ce cadre multilatéral offert par l’OMC correspond à mon sens aux valeurs de la gauche, contrairement à la multiplication actuelle d’accords commerciaux bilatéraux où les rapports de force sont très inégaux.

José Bové : Je reconnais qu’il y a de la démocratie dans l’OMC : contrairement à la Banque mondiale ou au Fonds monétaire international (FMI), c’est une institution que l’on peut mettre en échec. On l’a vu à Seattle ou à Cancún. C’est encourageant. Mais la belle architecture que vous venez de décrire sert, selon moi, non l’intérêt général mais des intérêts privés. Quand l’OMC statue en faveur de la banane d’Amérique centrale contre celle des pays africains, moins compétitive, elle tranche en réalité au profit de multinationales américaines comme Chiquita et Dole. Et quand l’Union européenne réclame l’ouverture des marchés des services au Sud, ce n’est pas la volonté générale qui s’exprime mais des intérêts particuliers.
De plus, l’OMC a beau jeu d’instaurer des règles sur les tarifs douaniers. Je ne vois pas comment on peut parler de commerce libre et non faussé quand, en Chine, la monnaie est à ce point sous-évaluée, ce dont profitent largement les multinationales qui délocalisent leurs activités dans ce pays. Mais il est vrai que les taux de change échappent à l’arbitrage de l’OMC.

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