« J’allais chez l’épicier (vendredi, ndlr) lorsque j’ai été arrêtée par les forces de l’ordre. Une fois au commissariat, des policiers m’ont frappée, ont déchiré mes vêtements, insultée puis enfermée dans une cellule pour femmes », nous confie Kalthoum, au téléphone, après avoir été remise en liberté. Pourtant, affirme-t-elle, ni elle ni aucun membre de sa famille n’a participé de près ou de loin au blocage du port de Sidi Ifni. « Tous ces événements sont arrivés soudainement, rien n’était organisé. Tout le monde était dans le même sac pour les policiers, alors que beaucoup de civils n’avaient rien à foutre des revendications des protestataires », ajoute Mohamed, autre habitant de Sidi Ifni. « Heureusement qu’ils ne nous ont rien fait à moi et ma famille. Mais mes voisins ont eu moins de chance », poursuit-il.
Depuis une semaine, rien ne va plus dans cette petite ville de 20 000 habitants située dans le sud-ouest marocain. D’ordinaire très calme, elle est sortie de son anonymat ce week-end après de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les habitants qui ont bloqué le port vendredi. De source officielle, les échauffourées ont fait 44 blessés dont 27 policiers et une vingtaine de personnes ont été arrêtées. Mais selon M. Herbaz, membre du Centre Marocain des Droits de l’Homme (CMDH), contacté sur place, à Sidi Ifni, « entre 140 et 160 personnes restent incarcérées pour avoir jeté des pierres sur les forces de l’ordre ».
Passe d’armes entre le gouvernement marocain et les associations des droits de l’homme
Rien n’est sûr concernant le bilan humain des affrontements et sur la situation actuelle de Sidi Ifni. Selon le gouvernement marocain, le calme serait revenu dans la ville depuis samedi soir. Faux pour Brahim Sbaalil, président de la section locale du CMDH de Sidi Ifni, qui parle d’une ville « en état de siège ». « Au moment où je vous parle, les forces de l’ordre sont en train de chercher les manifestants qui se sont réfugiés dans les montagnes alentours ». Témoignages à l’appui, il explique que « même si la situation s’est détendue par rapport aux derniers jours, les habitants ne peuvent sortir de chez eux que discrètement ».
Alors que le gouvernement marocain a déclaré dimanche qu’il n’y a pas eu « le moindre décès » dans ces affrontements, d’autres sources, à commencer par le CMDH, démentent. M. Sbaalil a déclaré à la presse samedi qu’« il y aurait entre un et cinq morts ». Joint par Afrik.com lundi, il continue de défendre sa position même s’il n’est pas en possession d’un bilan exact de victimes. « Il y a eu des morts évidemment, nous affirme-t-il. On a déjà retrouvé deux cadavres dans les coins de la ville et de nombreuses personnes sont portées disparues, dont deux membres du CMDH et de l’AMDH (Association Marocaine des Droits de l’Homme, ndlr) dont on n’a aucune nouvelle ». Une information confirmée par le président du CMDH, Khaled Cherkaoui : « Jusqu’ici, on n’a pas de certitudes mais des disparitions sont bien enregistrés ». Cependant, la position de la l’AMDH est plus prudente. Khadija Ryadi, présidente de l’association, explique qu’elle ne peut infirmer ni confirmer ces allégations ni même dire qu’un membre de son association est porté disparu. « Mais les disparitions sont avérées et il est probable qu’il y ait eu des morts vu la façon sauvage dont les manifestants ont été réprimés. Des membres de l’AMDH ont souhaité entrer à l’hôpital pour y voir plus clair sur la situation, mais ils ont été interdit d’accès », nous a-t-elle expliqué.
Toutefois, le médecin-chef de l’hôpital provincial de Sidi Ifni, Mohamed Chafiq, a affirmé dimanche à la chaîne de télévision Al Oula que l’établissement n’a reçu aucun cas de décès suite aux incidents survenus samedi au port de Sidi Ifni. Alors comment M. Sbaalil peut-il savoir qu’il y a des morts alors qu’il est actuellement à Rabat ? M. Sbaabil répond sans hésiter : « Je sais parfaitement ce qui se passe. Je suis relié à la ville par téléphone 24h/24 et j’ai reçu des témoignages de familles qui me disent les mêmes choses. Mais l’Etat marocain a sorti une version officielle. Concernant les disparus, les autorités ont suggéré que si les disparitions sont avérées, il vaut mieux attendre qu’on retrouve leur corps puis recevoir des certificats des médecins qui diront s’ils ont été tués ou non par les forces de l’ordre. Mais il y en a qu’on ne retrouvera pas car l’Etat s’est débrouillé pour les cacher ». Comment ? « En les jetant à la mer par exemple », répond-t-il laconiquement.
Al Jazeera dans la ligne de mire de l’Etat marocain
Al Jazeera est allée plus loin dans ses allégations en faisant état de « six à dix morts » après que les forces de l’ordre ont délogé les manifestants du port. Mais M. Sbaalil explique que la chaîne qatarie n’aurait fait que reprendre les informations fournies, en partie, par lui. Il a d’ailleurs été interpellé dimanche par la police judiciaire après avoir déclaré « solennellement » à la chaîne qu’il y a eu des morts. Il n’en demeure pas moins qu’Al-Jazeera est aujourd’hui la cible d’une campagne hostile de la part des médias marocains, comme en témoigne l’éditorial du Matin qui accuse la chaîne « de faire ouvertement dans le mensonge »...
Lire la suite: http://www.afrik.com/article14496.html
Depuis une semaine, rien ne va plus dans cette petite ville de 20 000 habitants située dans le sud-ouest marocain. D’ordinaire très calme, elle est sortie de son anonymat ce week-end après de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les habitants qui ont bloqué le port vendredi. De source officielle, les échauffourées ont fait 44 blessés dont 27 policiers et une vingtaine de personnes ont été arrêtées. Mais selon M. Herbaz, membre du Centre Marocain des Droits de l’Homme (CMDH), contacté sur place, à Sidi Ifni, « entre 140 et 160 personnes restent incarcérées pour avoir jeté des pierres sur les forces de l’ordre ».
Passe d’armes entre le gouvernement marocain et les associations des droits de l’homme
Rien n’est sûr concernant le bilan humain des affrontements et sur la situation actuelle de Sidi Ifni. Selon le gouvernement marocain, le calme serait revenu dans la ville depuis samedi soir. Faux pour Brahim Sbaalil, président de la section locale du CMDH de Sidi Ifni, qui parle d’une ville « en état de siège ». « Au moment où je vous parle, les forces de l’ordre sont en train de chercher les manifestants qui se sont réfugiés dans les montagnes alentours ». Témoignages à l’appui, il explique que « même si la situation s’est détendue par rapport aux derniers jours, les habitants ne peuvent sortir de chez eux que discrètement ».
Alors que le gouvernement marocain a déclaré dimanche qu’il n’y a pas eu « le moindre décès » dans ces affrontements, d’autres sources, à commencer par le CMDH, démentent. M. Sbaalil a déclaré à la presse samedi qu’« il y aurait entre un et cinq morts ». Joint par Afrik.com lundi, il continue de défendre sa position même s’il n’est pas en possession d’un bilan exact de victimes. « Il y a eu des morts évidemment, nous affirme-t-il. On a déjà retrouvé deux cadavres dans les coins de la ville et de nombreuses personnes sont portées disparues, dont deux membres du CMDH et de l’AMDH (Association Marocaine des Droits de l’Homme, ndlr) dont on n’a aucune nouvelle ». Une information confirmée par le président du CMDH, Khaled Cherkaoui : « Jusqu’ici, on n’a pas de certitudes mais des disparitions sont bien enregistrés ». Cependant, la position de la l’AMDH est plus prudente. Khadija Ryadi, présidente de l’association, explique qu’elle ne peut infirmer ni confirmer ces allégations ni même dire qu’un membre de son association est porté disparu. « Mais les disparitions sont avérées et il est probable qu’il y ait eu des morts vu la façon sauvage dont les manifestants ont été réprimés. Des membres de l’AMDH ont souhaité entrer à l’hôpital pour y voir plus clair sur la situation, mais ils ont été interdit d’accès », nous a-t-elle expliqué.
Toutefois, le médecin-chef de l’hôpital provincial de Sidi Ifni, Mohamed Chafiq, a affirmé dimanche à la chaîne de télévision Al Oula que l’établissement n’a reçu aucun cas de décès suite aux incidents survenus samedi au port de Sidi Ifni. Alors comment M. Sbaalil peut-il savoir qu’il y a des morts alors qu’il est actuellement à Rabat ? M. Sbaabil répond sans hésiter : « Je sais parfaitement ce qui se passe. Je suis relié à la ville par téléphone 24h/24 et j’ai reçu des témoignages de familles qui me disent les mêmes choses. Mais l’Etat marocain a sorti une version officielle. Concernant les disparus, les autorités ont suggéré que si les disparitions sont avérées, il vaut mieux attendre qu’on retrouve leur corps puis recevoir des certificats des médecins qui diront s’ils ont été tués ou non par les forces de l’ordre. Mais il y en a qu’on ne retrouvera pas car l’Etat s’est débrouillé pour les cacher ». Comment ? « En les jetant à la mer par exemple », répond-t-il laconiquement.
Al Jazeera dans la ligne de mire de l’Etat marocain
Al Jazeera est allée plus loin dans ses allégations en faisant état de « six à dix morts » après que les forces de l’ordre ont délogé les manifestants du port. Mais M. Sbaalil explique que la chaîne qatarie n’aurait fait que reprendre les informations fournies, en partie, par lui. Il a d’ailleurs été interpellé dimanche par la police judiciaire après avoir déclaré « solennellement » à la chaîne qu’il y a eu des morts. Il n’en demeure pas moins qu’Al-Jazeera est aujourd’hui la cible d’une campagne hostile de la part des médias marocains, comme en témoigne l’éditorial du Matin qui accuse la chaîne « de faire ouvertement dans le mensonge »...
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