Europe
26/11/2014 00:12

Le pape François au Parlement européen

C'est en se positionnant dans la continuité de la visite du Pape Jean-Paul II, il y a 25 ans, que le pape François s'est rendu au Parlement européen, ce 25 novembre et y a tenu un discours. Il a pris également la parole au Conseil de l'Europe, exhortant les Européens à la paix et au respect de la dignité humaine. Dans d'autres circonstances, un homme de gauche aurait pu assumer sa parole. Le pape François veut probablement mettre en évidence le fait que le clivage traditionnel droite / gauche n'est plus aussi fonctionnel qu'il l'a été, et que l'on pourrait bien le dépasser pour déboucher sur une vision plus universaliste de nos sociétés.
S'il a raison sur ce point, ce n'est pas l'unique question qui le préoccupe: les puissants n'éprouvent plus le besoin de se montrer pieux; ils n'ont plus besoin de la caution de l’Église. Dès lors, c'est ailleurs et dans un dépassement politique que le chef de l’Église catholique doit chercher ses soutiens. Concernant la paix, la faim, la dignité humaine, on ne peut que le suivre. Concernant la liberté de confession également. On notera qu'en parlant de "professer sans contrainte sa foi religieuse", il s'adressait à tous les fidèles et pas exclusivement aux catholiques.
C'est donc de façon tout à fait réductrice que les médias ont mis l'accent sur le point de son discours qui touchait à la bureaucratie européenne. La portée du message papal va bien au-delà de cette question et cherche à ramener, sinon pas l’Église catholique, tout au moins la parole évangélique, dans le paysage politique européen. On sait bien comment les puissants l'ont exploitée quand elle leur était utile. Qu'en fera le peuple s'il se l'accapare et qui sera son berger? Extrait du discours au Parlement (source : le site officiel du Vatican).


photo assemblée
« Quelle dignité existe vraiment, quand manque la possibilité d’exprimer librement sa pensée ou de professer sans contrainte sa foi religieuse? Quelle dignité est possible, sans un cadre juridique clair, qui limite le domaine de la force et qui fasse prévaloir la loi sur la tyrannie du pouvoir? Quelle dignité peut jamais avoir un homme ou une femme qui fait l’objet de toute sorte de discriminations? Quelle dignité pourra jamais avoir une personne qui n’a pas de nourriture ou le minimum nécessaire pour vivre et, pire encore, qui n’a pas le travail qui l’oint de dignité ?
Promouvoir la dignité de la personne signifie reconnaître qu’elle possède des droits inaliénables dont elle ne peut être privée au gré de certains, et encore moins au bénéfice d’intérêts économiques.
Mais il convient de faire attention pour ne pas tomber dans des équivoques qui peuvent naître d’un malentendu sur le concept de droits humains et de leur abus paradoxal. Il y a en effet aujourd’hui la tendance à une revendication toujours plus grande des droits individuels – je suis tenté de dire individualistes –, qui cache une conception de la personne humaine détachée de tout contexte social et anthropologique, presque comme une «monade» (μονάς), toujours plus insensible aux autres «monades» présentes autour de soi. Au concept de droit, celui - aussi essentiel et complémentaire - de devoir, ne semble plus associé, de sorte qu’on finit par affirmer les droits individuels sans tenir compte que tout être humain est lié à un contexte social dans lequel ses droits et devoirs sont connexes à ceux des autres et au bien commun de la société elle-même.
Par conséquent je considère qu’il est plus que jamais vital d’approfondir aujourd’hui une culture des droits humains qui puisse sagement relier la dimension individuelle, ou mieux, personnelle, à celle de bien commun, de ce «nous-tous» formé d’individus, de familles et de groupes intermédiaires qui s’unissent en communauté sociale. »


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