Humeurs - Rumeurs
20/02/2019 23:23

Laïcité et religion: le réveil des entourloupes de Bonaparte

Certains comparent Emmanuel Macron à Napoléon Bonaparte. Lui-même l'a fait à propos de ses ministres et des maréchaux d'empire*. C'est probablement exagéré. Pourtant, le Président de la République pourrait s'inspirer des entourloupes de son impérial prédécesseur à propos des cultes. La loi de 1905, de séparation de l’Église et de l’État, est en voie d'être modifiée dans le but d'améliorer la transparence du financement des cultes et de mieux garantir l'ordre public. Pour tout dire, il s'agit de lutter contre l'intégrisme islamique et les attentats meurtriers dont ses adeptes se rendent coupables en échange, paraît-il, de la promesse du paradis.
Lutter contre les attentats, de quelque nature qu'ils soient, est tout à fait souhaitable. Et cela pourrait même constituer une exigence des citoyens. Mais à quel prix ? Quelles règles le Gouvernement serait-il amené à mettre en œuvre pour garantir notre sécurité ? Quelles libertés (d'association, d'opinion, d'expression...) pourraient être remises en question, volatilisées au bénéfice de notre sécurité?



Le Gouvernement n'aurait aucune garantie réelle

Naturellement, je ne connais pas la réponse. Néanmoins, j'ai trouvé très actuels les extraits ci-dessous de « Jurisprudence de la cour de cassation de 1791 à 1813 »** qui concernent le Concordat de 1801 qui a régi les relations de l'Église et de l’État jusqu'en 1905.

«L'État ne pourrait avoir aucune prise sur des établissements et sur des hommes que l'on traiterait comme étrangers à l'État. Le système d'une surveillance raisonnable sur les cultes ne peut être garanti que par le plan connu d'une organisation légale de ces cultes. Sans cette organisation avouée et autorisée, toute surveillance serait nulle ou impossible parce que le Gouvernement n'aurait aucune garantie réelle de la bonne conduite de ceux qui professeraient des cultes obscurs dont les lois ne se mêleraient pas et qui dans leur invisibilité, s'il m'est permis de parler ainsi, sauraient toujours échapper aux lois.»


 
Une du New Statesman 11 juillet 2017

L'État est menacé

Et un peu plus loin :

«Un état n'a qu'une autorité précaire quand il a dans son territoire des hommes qui exercent une grande influence sur les esprits et sur les consciences sans que ces hommes lui appartiennent au moins sous quelques rapports. L'autorisation d'un culte suppose nécessairement l'examen des conditions suivant lesquelles ceux qui le professent se lient à la société et suivant desquelles la société promet de l'autoriser. La tranquillité publique n'est point assurée si l'on néglige de savoir ce que sont les ministres de ce culte, ... quels règlements ils promettent d'observer. L'État est menacé si ces règlements peuvent être faits ou changés sans son concours, s'il demeure étranger ou indiffèrent à la forme et à la constitution du gouvernement qui se propose de régir les âmes et s'il n'a dans des supérieurs légalement connus et avoués, des garants de la fidélité des inférieurs.»

Bonaparte avait pour objectif de pacifier les relations de l’Église catholique avec l’État mais également de garder un œil – et si possible son autorité – sur les cultes. La loi de 1905 a séparé l’Église et l’État. Au regard des extraits ci-dessus, j'ai le sentiment que le Gouvernement d'Emmanuel Macron, en 2019, s'apprête à reculer et à sacrifier la liberté de culte ou, en tout cas, qu'il ouvre la voie. Et vous, qu'en pensez-vous? Pire: quel sera le coup d'après?

* Quand Macron se compare (deux fois) à Napoléon, édité le 07/09/2017 par bfmtv.com
** de Jean-Baptiste Sirey, édité par Laporte en 1822, E-book gratuit.
 

Henri Vario-Nouioua



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