Asie & Extrême Orient
11/11/2008 16:36

La crise économique frappe la Chine de plein fouet

Pékin- Les usines ferment, des paysans venus travailler en ville retournent dans les campagnes, des clients étrangers annulent leurs commandes...


La crise mondiale a fait irruption dans l'économie chinoise, au sortir d'un âge d'or qui reposait largement sur les exportations.

Certes, l'Empire du Milieu garde une croissance enviable, à 9% en septembre, mais c'est néanmoins le chiffre le plus bas depuis cinq ans: l'an dernier le produit intérieur brut (PIB) avait progressé de 11,9%, tandis que les analystes n'excluent pas une chute à 7,5% en 2009.

Le régime communiste a réagi en annonçant dimanche soir un plan de stimulation de la croissance intérieure de 4.000 milliards de yuans (460 milliards d'euros/586 milliards de dollars), mais cela ne suffira pas forcément à sauver les exportateurs qui voient leurs clients étrangers annuler ou renvoyer des cargaisons. Les fêtes de fin d'année, l'un des principaux rendez-vous du commerce chinois, s'annoncent très mal.

Pour le fabricant textile Yiwu Bangjie, dans la province orientale du Zhejiang, le premier signe de la crise est venu d'un client américain de longue date, explique le directeur exécutif de la société, Tao Jianwei. "Quand la cargaison (de sous-vêtements) est arrivée au port américain et que nous avons demandé à notre client de la récupérer et de payer ce qu'il nous devait encore, il a répondu qu'il n'avait plus d'argent".

Et encore la société Yiwu Bangjie avait-elle assuré le chargement, ce qui devrait lui permettre d'obtenir le remboursement d'environ 90% des 100.000 dollars (78.500 euros) encore dus, précise M. Tao. D'autres ont moins de chance.

Des milliers d'usines ont fermé, particulièrement dans le jouet et la chaussure. Les chiffres officiels sont incomplets, mais selon l'agence de planification économique 67.000 petites et moyennes entreprises (PME) ont mis la clef sous la porte au premier semestre 2008. Depuis, pas un jour ne passe sans son lot de fermetures et de licenciements.

Le fret maritime de matières premières et de produits manufacturés subit directement les conséquences du ralentissement. Le Baltic Dry Index du transport de matières sèches sur 40 routes maritimes dans le monde, indicateur-clef de la demande, a dégringolé de 11.793 points à 891 entre mai et novembre. Ken Wong, directeur d'une société de fret maritime à Shanghaï, a vu ses bénéfices chuter de 30% cette année.

Chen Tong, directrice de l'usine de boîtes en bois Fuzhou Xinrong Trading, redouble de prudence. "Si la commande dépasse les 100.000 yuans (14.600 dollars), nous vérifions la solvabilité de (l'acheteur) et son marché", explique-t-elle, entourée de boîtes décorées de Pères Noël, de saint chrétiens ou de Vierges Marie. "Il faut faire ça aujourd'hui pour être tranquille."

Le ministère chinois du commerce estime que les entreprises américaine doivent à elles seules 100 milliards de dollars (78,5 milliards d'euros) à des exportateurs chinois. Et le problème d'abord apparu dans la construction gagne les produits de consommation, comme l'habillement ou l'électroménager.

Et l'effet-domino continue: faiblesse des exportations et manque de finances obligent, les commandes chinoises d'acier, de métal et autres matières reculent.

La crise touche désormais les "cols blancs", qui craignent pour leur emploi et réduisent leurs dépenses, tandis que les travailleurs migrants, frappés par les fermetures d'usines et l'abandon de programmes de construction commencent à rentrer dans leurs campagnes.

Pékin a tenté une thérapie de choc en abaissant les taux d'intérêt trois fois en deux mois et en promettant des centaines de milliers de dollars de réductions fiscales, garanties de crédit, nouveaux projets et autres mesures, mais nombre de Chinois ne sont pas rassurés pour autant. Quelques semaines à peine après le triomphe des Jeux olympiques de Pékin, beaucoup se demandent si le miracle économique n'était pas un mirage.

"Fini le bon temps", constate Pan Henfei, robuste trentenaire qui recycle papier et bouteilles à Shanghaï, capitale financière de l'essor chinois de ces dernières années: comme les bureaux économisent sur leurs abonnements aux journaux et sur les fournitures, le chiffonnier trouve moins de déchets. Et il n'obtient plus que 1 yuan du kilogramme, soit 40% de moins qu'il y a quelques mois.

"Je suis juste un pauvre migrant qui essaie de réussir dans la grande ville pour pouvoir sortir mes enfants du village", soupire-t-il. "Aujourd'hui, certains de mes amis de la campagne envisagent de laisser tomber ce travail et de rentrer chez eux. On pourrait au moins travailler la terre".


Source: Yahoo News


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