Tribune Libre
15/06/2007 11:26

Dans l'HUMA: TVA sociale Fillon passe aux aveux

Editorial de Jean-Paul Piérot


Pourquoi faire payer les pauvres ? Parce qu’ils sont les plus nombreux. Telle semble être la logique qui commande aux annonces distillées jour après jour par les membres du gouvernement. François Fillon s’est donc mis à table, comme on dit dans les commissariats. Dans un élan de sincérité, d’inattention ou de calcul, le premier des ministres a lâché une bombe en chiffrant...



à 5 % la hausse de la TVA concoctée à Matignon, ou plutôt à l’Élysée, le centre unique du pouvoir désormais. Si les citoyens ne parviennent pas à faire reculer sur

ce point le gouvernement, la TVA, l’impôt le plus injuste qui soit, puisque frappant le consommateur de la même somme quels que soient ses revenus, passera à plus de 24,6 % ! Une augmentation inédite, qui devait peut-être rester quelques semaines dans les tiroirs ministériels,

le temps de constituer une Chambre d’enregistrement toute bleue au Palais Bourbon au soir du 17 juin.

À huit jours d’intervalle, et au lendemain d’une campagne durant laquelle Nicolas Sarkozy s’est posé en « candidat du pouvoir d’achat », son gouvernement vient d’assener deux coups au monde du travail : la taxe sur les soins médicaux, et aujourd’hui la montée en flèche de la TVA. Aussitôt une question s’impose : pourquoi le numéro 2

de l’exécutif s’est-il laissé aller à tant de franchise ?

Dans les circonscriptions où ils battent la campagne, certains candidats de l’UMP ou autres centristes associés ont dû rester pantois devant un aveu

qui devrait, en toute démocratie, se payer comptant dans les urnes. Car enfin, comment peut-on voter pour des candidats à la députation qui se préparent à faire les poches des consommateurs salariés, chômeurs, retraités pour payer les exonérations des foyers fiscaux les plus opulents

et les allégements de cotisations sociales des employeurs ? Tous ces cadeaux enrubannés que sont le bouclier fiscal qui protège les grandes fortunes de l’impôt de solidarité et la suppression des frais de succession ont un coût.

Le gouvernement a trouvé la solution, c’est chacun et chacune de nous qui paiera la note. Efficace, puisque nous sommes les plus nombreux...

L’explication la plus rationnelle de la franchise de François Fillon tient au fait que les dirigeants de droite se sentent tellement sûrs d’eux, à la veille du second tour des élections législatives, qu’ils ne prennent plus aucune précaution. À croire qu’ils se voient déjà à la tête

d’une République à genoux, sans contre-pouvoirs,avec une Assemblée nationale peuplée d’hommes de paille au garde à vous, tout de bleu vêtus. Mais peut-être François Fillon a-t-il péché par excès d’arrogance. Peut-être a-t-il oublié qu’on ne peut tromper le peuple tout le temps. Que la lucidité des citoyens peut se réveiller entre deux tours d’un scrutin.

Bien sûr, ils maquillent la vérité avec une assurance déconcertante. Après avoir nommé « TVA sociale », comme par antiphrase, cette hausse de l’impôt indirect, les conseillers en communication ont changé l’appellation : ce sera, a dit sans rire le très sérieux M. Fillon, une « TVA antidélocalisations ».

Les cotisations sociales étant du salaire différé, leur allégement fait baisser le prix du travail. Ce qui serait une incitation à ne pas délocaliser ! Ainsi on répond au drame des délocalisations toujours motivées par des exigences de profit pour les actionnaires en livrant

les travailleurs à la concurrence du moins coûtant.

Les 25 milliards d’euros d’exonération déjà accordés ont-ils jamais empêché les fonds d’investissement de fermer ici pour exploiter ailleurs ? Les salariés de l’usine Jallatte, dans le Gard, en savent quelque chose.

Qui peut croire qu’une hausse de 5 % de la TVA n’entraînera pas de hausse des prix ? Certainement pas l’homme qui a déclaré que « l’État ne contrôle pas le niveau des prix et il était à craindre qu’une hausse de

la TVA, malgré la diminution des charges, ne fût intégrée dans la marge et donc intégralement répercutée dans le prix de vente »... Qui donc a fait cette juste remarque ? Nicolas Sarkozy, en 2004, alors qu’il officiait à Bercy...

Source: le Web du l'HUMANITE du 14/06/2007


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