Les vifs débats qui ont accompagné la loi sur l’immigration, adoptée le 23 octobre, ont laissé des traces. L’amendement du député UMP Yves Mariani sur les tests ADN a provoqué un tir nourri de critiques, notamment de la part des évêques, nombreux à prendre position contre cette disposition. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, a mal vécu cette polémique qui, selon lui, a brouillé la compréhension d’une politique « cohérente et équilibrée ».
Le 20 octobre, Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont, signait dans Le Monde une tribune dénonçant la «régression» que représenteraient ces tests génétiques. Conseiller régional d’Auvergne, lui-même d’une famille clermontoise catholique, Brice Hortefeux avait peu apprécié l’intervention.
Alors que le président Sarkozy doit effectuer dans une semaine une visite officielle au Vatican, l’un de ses plus proches ministres a donc choisi d’adresser personnellement une lettre à chaque évêque dont La Croix publie le texte intégral (lire p. 19). « Le calme revenu, cette lettre s’inscrit dans la continuité du dialogue permanent que nous avons avec l’épiscopat », explique-t-on au cabinet de Brice Hortefeux.
Une justification et une explication
La missive ne fait aucune allusion à l’affaire des tests ADN ; cet amendement, finalement très encadré en commission mixte paritaire (autorisation du juge, liste limitée de pays…), aura une portée relativement limitée et, du point de vue du ministère, le dossier est en quelque sorte clos. La lettre d’aujourd’hui se présente en revanche comme une justification et une explication sur une politique gouvernementale reposant sur quatre points : lutte contre l’immigration clandestine ; organisation de l’immigration légale ; intégration des immigrés légaux et, enfin, aide au développement des pays d’origine.
Déjà, au printemps 2006, la précédente loi sur l’immigration, suscitée par Nicolas Sarkozy alors ministre de l’intérieur, avait donné lieu à des échanges tendus avec l’épiscopat. Nicolas Sarkozy avait reçu trois évêques place Beauvau, puis accepté une réunion de travail avec ses conseillers techniques pour étudier dans le détail les points faisant difficulté. Il avait ensuite écrit aux évêques pour leur annoncer quelques concessions.
De la même manière, à l’automne dernier, les réserves exprimées par l’épiscopat ont contribué, avec d’autres, à fournir des inflexions aux débats parlementaires. Par exemple, la durée de recours pour les déboutés du droit d’asile, qui risquait d’être raccourcie, a été maintenue à un mois. Une mesure prévoyant qu’un conjoint de Français soit obligé de repartir dans son pays d’origine pour obtenir un titre de séjour a été abandonnée. Ainsi les évêques – avec les responsables des autres Églises chrétiennes – ont-ils réussi à peser à la marge sur les textes.
Une grande distance entre l'Eglise et le gouvernement
Sur le fond, une grande distance subsiste cependant entre l’Église et le gouvernement dans l’approche de ce dossier, politiquement sensible et techniquement complexe. Pour l’épiscopat, la régulation des flux migratoires ne peut se faire au mépris de l’attention aux plus démunis ou du droit de vivre en famille. « Nous nous inquiétons des conditions toujours plus restrictives mises au regroupement familial », insistaient encore les évêques de France le 2 octobre. De son côté, l’actuelle majorité ne change pas le cap de la politique d’« immigration choisie » mise en place par Nicolas Sarkozy.
De ce point de vue, la lettre de Brice Hortefeux aux évêques n’apporte pas d’éléments nouveaux, mais se présente comme un argumentaire. Avec 125 000 bénéficiaires du droit d’asile, la France demeure au premier rang des pays de l’Union européenne, plaide le ministre, avant de défendre sa politique de lutte contre l’immigration clandestine : « Une personne sans papiers enfreint la loi mais elle est souvent une victime, cible d’employeurs sans scrupule… »
L’actuelle politique d’expulsion des étrangers, calée sur des objectifs chiffrés, continue pourtant de soulever de nombreuses inquiétudes et critiques sur le terrain. Pas plus sur cette question que sur la politique d’intégration, la lettre ne marque une vraie ouverture, déplore le P. Jacques Turck : « Le ministre m’a reçu deux fois, témoigne le directeur du Service de l’épiscopat pour les questions familiales et sociales. À chaque fois, je lui dis que la loi sur l’immigration ne comportait aucun élément positif… Ce n’est qu’une série d’interdits. Pourquoi ne pas proposer des écoles de langue chez nous pour ceux qui ne parlent pas notre langue ? Seules les paroisses et les associations osent le faire. »
La nouvelle présidence de la Conférence des évêques de France, réunie ces jours-ci à Paris, a choisi de ne pas commenter sur l’heure la lettre reçue du ministre. Interrogé par ailleurs, Mgr Claude Schockert, évêque de Belfort-Montbéliard et responsable de la Pastorale des migrants, estime pour sa part, à propos de Brice Hortefeux : « Nous reconnaissons sa recherche de dialogue, quand il nous dit que l’Église est tout à fait dans son rôle. De la même manière, nous disons que le gouvernement a le droit de chercher des solutions aux phénomènes migratoires. » Chacun dans son rôle, au fond, mais pas sans la volonté d’un dialogue actif.
Le 20 octobre, Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont, signait dans Le Monde une tribune dénonçant la «régression» que représenteraient ces tests génétiques. Conseiller régional d’Auvergne, lui-même d’une famille clermontoise catholique, Brice Hortefeux avait peu apprécié l’intervention.
Alors que le président Sarkozy doit effectuer dans une semaine une visite officielle au Vatican, l’un de ses plus proches ministres a donc choisi d’adresser personnellement une lettre à chaque évêque dont La Croix publie le texte intégral (lire p. 19). « Le calme revenu, cette lettre s’inscrit dans la continuité du dialogue permanent que nous avons avec l’épiscopat », explique-t-on au cabinet de Brice Hortefeux.
Une justification et une explication
La missive ne fait aucune allusion à l’affaire des tests ADN ; cet amendement, finalement très encadré en commission mixte paritaire (autorisation du juge, liste limitée de pays…), aura une portée relativement limitée et, du point de vue du ministère, le dossier est en quelque sorte clos. La lettre d’aujourd’hui se présente en revanche comme une justification et une explication sur une politique gouvernementale reposant sur quatre points : lutte contre l’immigration clandestine ; organisation de l’immigration légale ; intégration des immigrés légaux et, enfin, aide au développement des pays d’origine.
Déjà, au printemps 2006, la précédente loi sur l’immigration, suscitée par Nicolas Sarkozy alors ministre de l’intérieur, avait donné lieu à des échanges tendus avec l’épiscopat. Nicolas Sarkozy avait reçu trois évêques place Beauvau, puis accepté une réunion de travail avec ses conseillers techniques pour étudier dans le détail les points faisant difficulté. Il avait ensuite écrit aux évêques pour leur annoncer quelques concessions.
De la même manière, à l’automne dernier, les réserves exprimées par l’épiscopat ont contribué, avec d’autres, à fournir des inflexions aux débats parlementaires. Par exemple, la durée de recours pour les déboutés du droit d’asile, qui risquait d’être raccourcie, a été maintenue à un mois. Une mesure prévoyant qu’un conjoint de Français soit obligé de repartir dans son pays d’origine pour obtenir un titre de séjour a été abandonnée. Ainsi les évêques – avec les responsables des autres Églises chrétiennes – ont-ils réussi à peser à la marge sur les textes.
Une grande distance entre l'Eglise et le gouvernement
Sur le fond, une grande distance subsiste cependant entre l’Église et le gouvernement dans l’approche de ce dossier, politiquement sensible et techniquement complexe. Pour l’épiscopat, la régulation des flux migratoires ne peut se faire au mépris de l’attention aux plus démunis ou du droit de vivre en famille. « Nous nous inquiétons des conditions toujours plus restrictives mises au regroupement familial », insistaient encore les évêques de France le 2 octobre. De son côté, l’actuelle majorité ne change pas le cap de la politique d’« immigration choisie » mise en place par Nicolas Sarkozy.
De ce point de vue, la lettre de Brice Hortefeux aux évêques n’apporte pas d’éléments nouveaux, mais se présente comme un argumentaire. Avec 125 000 bénéficiaires du droit d’asile, la France demeure au premier rang des pays de l’Union européenne, plaide le ministre, avant de défendre sa politique de lutte contre l’immigration clandestine : « Une personne sans papiers enfreint la loi mais elle est souvent une victime, cible d’employeurs sans scrupule… »
L’actuelle politique d’expulsion des étrangers, calée sur des objectifs chiffrés, continue pourtant de soulever de nombreuses inquiétudes et critiques sur le terrain. Pas plus sur cette question que sur la politique d’intégration, la lettre ne marque une vraie ouverture, déplore le P. Jacques Turck : « Le ministre m’a reçu deux fois, témoigne le directeur du Service de l’épiscopat pour les questions familiales et sociales. À chaque fois, je lui dis que la loi sur l’immigration ne comportait aucun élément positif… Ce n’est qu’une série d’interdits. Pourquoi ne pas proposer des écoles de langue chez nous pour ceux qui ne parlent pas notre langue ? Seules les paroisses et les associations osent le faire. »
La nouvelle présidence de la Conférence des évêques de France, réunie ces jours-ci à Paris, a choisi de ne pas commenter sur l’heure la lettre reçue du ministre. Interrogé par ailleurs, Mgr Claude Schockert, évêque de Belfort-Montbéliard et responsable de la Pastorale des migrants, estime pour sa part, à propos de Brice Hortefeux : « Nous reconnaissons sa recherche de dialogue, quand il nous dit que l’Église est tout à fait dans son rôle. De la même manière, nous disons que le gouvernement a le droit de chercher des solutions aux phénomènes migratoires. » Chacun dans son rôle, au fond, mais pas sans la volonté d’un dialogue actif.