France
25/11/2024 23:44

Apologie du terrorisme : une controverse politique en cours

Un député de La France insoumise (LFI), Ugo Bernalicis, a récemment soumis une proposition de loi visant à retirer le délit d’apologie du terrorisme du code pénal pour le réintégrer dans la loi sur la liberté de la presse, là où il se trouvait avant 2014. Cette initiative suscite des débats intenses depuis plusieurs jours, certains acteurs politiques interprétant cette démarche comme une tentative d’éliminer totalement ce délit.


Le 19 novembre, cette proposition a été introduite, arguant que l’inclusion de ce délit dans le code pénal avait restreint la liberté d’expression. La loi de 1881 sur la liberté de la presse, selon ses défenseurs, offrait un cadre plus adapté pour traiter des délits relatifs à l’apologie de crimes, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité. En réponse, des critiques sévères ont émergé, provenant de divers horizons politiques, affirmant que la suppression du délit enverrait un signal dangereux dans le contexte actuel.

En 2014, après une série d’attentats, le délit d’apologie du terrorisme avait été retiré de la loi sur la presse pour être inséré dans le code pénal. Cette modification, opérée sous la présidence de François Hollande, visait à durcir les mesures antiterroristes et à faciliter les poursuites contre des actes perçus comme une incitation ou une justification des violences terroristes. Cela avait également permis d’appliquer des techniques d’enquête plus intrusives, telles que la surveillance électronique et les infiltrations, tout en allongeant le délai de prescription à trois ans.

Réactions divergentes

Le ministre de la Justice a récemment réaffirmé que l’apologie du terrorisme devait être combattue vigoureusement, soulignant que ce délit vise à prévenir toute forme de justification ou d’excuse pour des actes terroristes. D’autres acteurs politiques et juridiques, cependant, dénoncent un usage excessif de cette incrimination. Certains estiment qu’elle est devenue un outil de censure, limitant les débats et engendrant des autocensures par crainte de poursuites.

Des universitaires, tels que Vanessa Codaccioni, spécialisée dans les politiques répressives, critiquent également cette évolution. Elle estime que le cadre actuel a transformé l’apologie du terrorisme en un moyen de limiter la liberté d’expression, en particulier lorsqu’il s’agit de sujets sensibles comme les conflits internationaux.

Les chiffres témoignent d’une augmentation significative des poursuites depuis 2014. Alors qu’elles étaient rares avant cette date, elles ont explosé en 2015 et 2016, notamment après des attentats marquants. Cette tendance s’est poursuivie, avec des centaines de condamnations chaque année. Plus récemment, les événements internationaux, comme l’attaque du Hamas en 2023, ont intensifié les signalements et les poursuites, mettant en lumière les tensions entre la lutte contre le terrorisme et la protection des libertés fondamentales.

Pour ses auteurs, la proposition de loi vise à rétablir un équilibre entre la nécessaire lutte contre le terrorisme et la préservation des droits fondamentaux. Cependant, cette démarche est perçue par certains comme une provocation politique, surtout dans un contexte où les figures de LFI sont régulièrement accusées d’ambiguïté concernant certains groupes ou actes terroristes.

L’initiative a également relancé les fractures au sein de la gauche française. Certains membres du Parti socialiste, partenaires historiques de LFI, se distancient de cette proposition, arguant que la priorité devrait être la défense des libertés publiques tout en protégeant la société contre le fanatisme et la violence.


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